Communiqué de l’Observatoire de la liberté d’expression
L’Observatoire de la liberté d’expression, face à la censure absurde d’une pipe sur une affiche extraite d’un film de Jacques TATI, par la SNCF et la RATP, lesquelles s’arrogent sur les œuvres des droits qui sont largement abusifs, a décidé de lancer une pétition à tous les citoyens et toutes les structures qui défendent la liberté de création.
Il convient de se mobiliser face à la généralisation du politiquement correct qui n’hésite pas à déformer les œuvres du patrimoine : exigeons de la SNCF et de la RATP qu’elles procèdent au retirage des affiches qui annoncent l’exposition Tati à la Cinémathèque, et que la pipe de Monsieur Hulot apparaisse avec son culot, et non avec la ridicule hélice jaune qui le masque.
La pétition est signable ici directement en ligne
La loi Evin interdit toute propagande ou publicité, directe ou indirecte, en faveur du tabac ou des produits du tabac. Hulot, personnage créé par Jacques Tati, fumait la pipe. La loi Evin date de 1991.Tati est mort avant la loi Evin. La SNCF et la RATP n’en ont cure (pipe évidemment). Considérant que la photographie de Tati jouant Hulot sur son solex, extraite du film « Mon oncle », serait une infraction à la loi, suivant en cela une « jurisprudence » établie hors des tribunaux par la BNF et Gallimard qui avaient supprimé la cigarette de Sartre sur le catalogue de l’exposition consacrée à ce dernier, et celle de la Poste procédant à la même suppression pour Malraux sur un timbre (ce qui par parenthèse montre que la taille de l’objectus delictii ne fait rien à l’affaire), elles ont décidé d’affubler le tuyau (de pipe) d’une ridicule et jaune hélice à vent.
Voilà donc des œuvres (un film, une photographie) révisées et dénaturées, d’une double manière.
Dans leur interprétation, d’abord. Décider que la photographie retouchée serait une publicité ou une propagande pour le tabac est un contresens, le sujet étant tout autre, et la fantaisie de Tati franchement incompatible avec cette assimilation absurde.
Pour satisfaire aux fourches caudines du fantasme du risque zéro d’infraction à la loi, la précaution consiste en outre à changer le sens de la photographie, sans égard pour le droit de l’auteur pour l’intégrité de son œuvre. Or non seulement l’image qui sert d’affiche pour l’exposition qui commence à la Cinémathèque est changée, mais comme elle est un extrait du film, elle n’y correspond plus, car on ne verra pas dans ce dernier l’hélice au bout de la pipe de Tati.
En est-on bien sûr ? Après tout, pourquoi s’arrêter en si bon chemin ? Ne verra-t-on pas les zélés du politiquement correct exiger que l’hélice soit incrustée image par image dans le film lui-même?
La liberté de création suppose que l’on respecte les œuvres, et qu’on n’en change pas le sens. Il en va de l’intérêt du public, et, dans une société démocratique, on ne se comporte pas comme au temps où Staline faisait supprimer d’une photographie un opposant qu’il avait « écarté ». On ne refait pas l’histoire des images, et l’Observatoire de la liberté de création demande à la RATP et à la SNCF de refaire les affiches de l’exposition en respectant l’image originelle, telle que l’a voulue l’auteur.