Communiqué de l’Observatoire de la liberté de création,
rejoint par DIRE, le GNCR, le SDI, le SFR-CGT et le SPI
L’Observatoire de la liberté de création, associé aux cinéastes, critiques, producteurs, distributeurs et exploitants indépendants, ont appris avec consternation que la ministre avait rejeté l’avis de la Commission de classification des films au sujet du classement du film Love de Gaspar Noé (interdit sur avis majoritaire aux moins de 16 ans avec avertissement).
En demandant à cette Commission indépendante, présidée par un membre du Conseil d’Etat, de reconsidérer son avis dans la perspective que Love soit interdit plus sévèrement, aux moins de 18 ans, une mesure qui condamnerait gravement l’exploitation du film en salles et à la télévision, la ministre de la Culture commet une ingérence politique intolérable.
Nous nous inquiétons que l’association Promouvoir, organisation d’extrême droite bien connue, ait une telle influence à la fois sur les juridictions administratives dont elle fait évoluer la jurisprudence dans un sens toujours plus répressif, mais aussi sur la ministre de la Culture qui croit bon de suivre cette jurisprudence sous influence, plutôt que l’avis d’une structure officielle comme l’est la Commission de classification.
L’inquiétude est d’autant plus vive que le cas du film de Gaspar Noé s’inscrit dans une dynamique plus vaste de censure et de répression des œuvres en France : municipalités qui décident de la déprogrammation de Timbuktu, Conseil d’Etat qui statue contre la recommandation de la ministre de la Culture pour le Nymphomaniac de Lars Von Trier et Saw 3D, pour ne parler que du cinéma…
Alors que la liberté d’expression était dans toutes les consciences il y a quelques mois, il est alarmant de constater qu’un gouvernement socialiste se plie aux attaques de l’extrême droite. Dans un Etat de droit, la délibération collective devrait primer sur les revendications extrémistes. La ministre de la Culture doit assurer et garantir la liberté de création de tous les auteurs, la défendre contre les idéologies totalitaires et montrer la voie du progressisme plutôt que de suivre celle d’un ordre moral hypocrite et réactionnaire.
Ainsi, nous appelons solennellement la ministre de la Culture et de la Communication à respecter la décision de la Commission de classification, ou bien à assumer sa décision personnelle. Fleur Pellerin deviendrait ainsi la nouvelle ministre de la Culture, de la Communication et de la Censure d’Etat.
L’Observatoire de la liberté de création et les organisations professionnelles signataires appellent également le ministère de la Culture, le CNC et la Commission de classification elle-même à ouvrir dans les meilleurs délais une réflexion sur une évolution de la législation permettant de protéger la liberté d’accès aux œuvres.
Paris, le 29 juin 2015
L’Observatoire de la liberté de création :
Ligue des droits de l’Homme
ACID (Association du Cinéma Indépendant pour sa Diffusion)
ADDOC (Association des cinéastes documentaristes)
AICA (Association Internationale des Critiques d’Art)
ARP (Auteurs Réalisateurs Producteurs)
CIPAC (Fédération des Professionnels de l’Art Contemporain)
CPGA (Comité Professionnel des Galeries d’Art)
Fédération Nationale des Arts de la Rue
FRAAP (Fédération des réseaux et associations d’artistes plasticiens)
Fédération des salons et fêtes du livres jeunesse
Ligue de l’enseignement
SFA-CGT (Syndicat Français des Artistes Interprètes)
SNAP-CGT (Syndicat National des Artistes Plasticiens)
Société des gens de lettres
SFCC (Syndicat Français de la Critique de Cinéma)
SNSP (Syndicat National des Scènes publiques)
SRF (Société des Réalisateurs de Films)
SYNDEAC (Syndicat des Entreprises Artistiques et Culturelles)
Rejoint par :
DIRE (Distributeurs Indépendants Réunis Européens),
Le GNCR (Groupement National des Cinémas de Recherche),
Le SDI (Syndicat des Distributeurs Indépendants),
Le Syndicat des réalisateurs français (SFR-CGT) et
Le SPI (Syndicat des Producteurs Indépendants).