Par Françoise Dumont, membre du Comité central de la LDH
Le 16 décembre, les parlementaires ont adopté en procédure accélérée le texte de loi réformant l’asile. Ce texte était très attendu parce que, depuis plusieurs années, le système français était jugé au bord de l’implosion et il maintenait les demandeurs d’asile dans une attente difficilement soutenable, puisque le délai de traitement des demandes atteignait souvent 2 ans. En outre, la France, à l’instar des autres Etats membres de l’Union européenne doit transposer dans sa législation un certain nombre des dispositions adoptées par l’Union européenne et, ce, au plus tard mi-juillet 2015
Lorsqu’en juillet, le gouvernement a présenté son projet de loi, les objectifs affichés pouvaient sembler consensuels : accélération des délais de procédures, amélioration des conditions d’accueil et d’hébergement, renforcement des droits des demandeurs. Il était également précisé que la France « entendait assumer son rôle de terre d’asile en Europe », alors même qu’elle n’était plus que le neuvième pays d’accueil européen.
Dans la foulée, de nombreuses associations se sont penchées sur le texte et elles ont pointé les dispositions d’une réforme jugée insatisfaisante. D’une manière générale, la transposition des dispositions européennes s’oriente vers le minimum minimorum et elle est même, sur certains points, moins ouverte que les dispositions européennes. Par ailleurs, les lacunes du texte sont significatives d’une vision du demandeur d’asile facilement suspecté d’être un profiteur du système français, d’en détourner l’objet et donc de contribuer indûment à l’engorgement des capacités d’accueil et des recours devant la CNDA.
Entre juillet et décembre, les propositions d’amendements avancées par diverses associations (dont la LDH) ont été nombreuses mais peu d’entre elles ont été retenues au moment du vote à l’Assemblée nationale. Il s’agit d’avancées vraiment à la marge si bien que les textes proposés dans ce dossier – même s’ils ont été élaborés avant le vote – gardent toute leur légitimité. Au final, il apparaît que les dispositions adoptées par les parlementaires risquent d’accroître la précarité sociale et juridique des demandeurs d’asile, de réduire l’effort de protection de la France et, donc, de multiplier les situations de souffrance.
Enfin, il est craindre que le projet de loi ne soit encore durci lors du passage au Sénat, prévu pour le printemps. A n’en pas douter, la nouvelle composition du Sénat et le discours « ambiant » risquent de nécessiter une réelle mobilisation de tous ceux qui sont attachés à la défense du droit d’asile. Rappelons d’ailleurs la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne a consacré le « droit d’asile » en tant que droit fondamental, en l’amarrant à la Convention de Genève et au traité instituant la Communauté européenne (article 18).