Mes chers amis, ces jours de mi avril sont des grands jours parce que les hommes invisibles ont pris la parole !
Ils sont salariés. Ils viennent du Mali, d’Algérie ou d’ailleurs. Ils travaillent dans la restauration, le nettoyage, le bâtiment. Ils payent cotisations sociales pour la maladie et les accidents du travail, mais ils ne bénéficient pas de l’accès aux soins, au médecin, et du droit d’être soignés autrement que par le recours à l’AME, l’Aide médicale aux étrangers ; ils payent des cotisations retraite, mais ils n’ont aucun espoir d’en toucher une ; ils payent leurs impôts comme tous ceux sur leur revenu et parce que comme nous tous ils consomment des produits sur lesquels les impôts indirects sont lourds, très lourds quand on gagne si peu !.
Ils ? Ces sont les travailleurs sans papiers, ces soutiers de l’économie française, ces obscurs des temps contemporains qui font marcher la machine économique.
Ils comptent souvent de nombreuses années de présence sur le territoire français, souvent plus d’une dizaine. Ils sont venus pour vivre et pour faire vivre leur famille. Et s’ils trouvent des emplois, bien qu’ils ne disposent pas des autorisations réglementaires nécessaires, c’est qu’ils remplissent une fonction économique. Ils ne prennent le travail de personne, ils prennent celui qui n’est pris par personne.
Le 15 avril 2008, ils ont pris la parole, ils ne se tairont plus. Ils ne veulent plus vivre dans la peur du contrôle, dans l’attente de la régularisation, dans la précarité des conditions de vie. Ils ne veulent plus être des exclus de la vie sociale. Ils ne veulent plus être ces ombres que personne ne voit.
Les travailleurs sans papiers veulent leur dignité.
La LDH soutient leurs revendications. La disposition législative récente qui prévoit une possibilité de régularisation de celles et ceux qui disposent d’un emploi régulier ne doit pas être utilisée au compte-gouttes, comme un geste symbolique limité à quelques exceptions : tous ces salariés, qui relèvent de son champ d’application, doivent en bénéficier. Car nous ne pouvons accepter que les espoirs nés de cette réglementation nouvelle aient été dans le même mouvement étroitement bornés par la parution de la liste des métiers concernés. Il faut changer cette politique de camouflage qui consiste à dire quelque chose dans la loi et à pratiquer son contraire avec des arrêtés. Parce que « la loi doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse », il faut en finir avec l’arbitraire et l’insécurité sociale qui entretiennent des conditions d’exploitation inacceptables. C’est non seulement une question de morale politique mais aussi, en dépit des mensonges xénophobes, l’intérêt de tous les travailleurs de ce pays.
La LDH appelle à participer massivement à toutes les initiatives de solidarité avec les salariés sans papiers en lutte. C’est le sens de notre présence et tout particulièrement à ce rassemblement d’aujourd’hui 16 avril devant le ministère du Travail, responsable de cette situation.
La LDH hier, comme aujourd’hui, manifeste toute sa solidarité envers les salariés sans papiers. Et demain, nous continuerons à revendiquer la régularisation de tous les sans papiers, avec les organisations syndicales quand ils sont salariés, avec RESF quand ils sont parents d’enfants scolarisés, avec UCIJ pour changer une réglementation inique qui crée des clandestins parce une politique d’immigration choisie est un mensonge et un leurre, avec toutes les forces qui, au nom des droits des l’Homme, luttent pour un changement de la politique d’immigration.
Communiqué LDH du 16 avril 2008
Paris, le 17 avril 2008.