17 décembre 2024 – Tribune « Plus de 300 personnalités internationales demandent à la justice française de ne pas extrader un miliant antifasciste en Hongrie » publiée sur Mediapart

Tribune commune signée entre autres par Nathalie Tehio, présidente de la LDH

Lire la tribune sur Mediapart

En mars 2023, la demande d’extradition d’un militant italien par la Hongrie a essuyé un refus net, notamment par crainte d’un traitement inhumain et de violations des droits fondamentaux. Aujourd’hui, c’est au tour de Rexhino Abazaj d’être menacé par la Hongrie orbaniste. Arrêté à Paris en novembre et sous le coup d’un mandat d’arrêt similaire, il est depuis emprisonné à la prison de Fresnes, où il attend la décision d’un tribunal français sur la demande d’extradition. Une seconde audience doit être organisée le 18 décembre pour statuer sur son sort.

Chaque mois de février depuis 1997, Budapest est le théâtre de la « Journée de l’honneur », un défilé organisé par des groupuscules néonazis venus de toute l’Europe, en commémoration de la tentative des troupes nazies et collaborationnistes hongroises de fuir la ville en février 1945. Non seulement la manifestation est tolérée par le pouvoir en place, mais à en croire l’inquiétude de députés européens, elle serait même appuyée par des fonds publics depuis l’arrivée de Viktor Orban au pouvoir.

En 2023, un rassemblement antifasciste était organisé pour protester contre la tenue de cet événement. Depuis lors, la Hongrie tient une vingtaine de militants antifascistes européens pour coupables des heurts qui ont éclaté entre militants de gauche et néo-nazis les 10 et 11 février. Lors des procès qui leur sont intentés, les seuls matériaux faisant office de preuves sont des extraits de caméras de vidéosurveillance, sur lesquels aucun de ces accusés n’est reconnaissable. Les témoins et victimes ont également été incapables de les identifier comme leurs agresseurs.

Pour autant, Viktor Orban lui-même, les principaux représentants de son gouvernement, les eurodéputés hongrois d’extrême-droite et la presse locale affiliée au pouvoir les désignent régulièrement comme un « gang » de voyous, de criminels ou encore de terroristes, sans aucun égard pour le principe de présomption d’innocence. Constamment pointée du doigt par la Commission européenne pour sa vulnérabilité face aux pressions politiques et médiatiques, dans le cadre de violations systémiques de l’État de droit en Hongrie, la justice hongroise a largement prouvé son inaptitude à juger les accusés de manière impartiale. Le cas de l’enseignante italienne Ilaria Salis, uniquement sauvée d’une peine injuste par une mobilisation ayant conduit à son élection au Parlement européen en juin dernier, est particulièrement parlant. Arrêtée dans un taxi, accusée successivement et de façon douteuse de différents chefs d’inculpation, puis emprisonnée « par mesure de précaution » pendant près de 15 mois, elle a subi un procès politique méprisant la plupart des garanties prévues par le droit européen, étant par exemple présentée devant la cour enchaînée et tenue en laisse par des gardiens cagoulés. Inculpée d’agressions dont ont résulté des lésions mineures, elle risque jusqu’à 24 ans de prison si elle ne plaide pas coupable, 11 ans dans le cas contraire. Par contraste, les militants néo-nazis qui ont mené des représailles dans les rues de Budapest après les agressions en question ont quant à eux écopé de quelques jours d’enfermement.

Le tribunal de Milan ne s’y est pas trompé : en mars 2023, quand un militant italien visé par un mandat d’arrêt européen lancé par la Hongrie a été arrêté, la demande d’extradition a essuyé un refus net, par crainte d’un traitement inhumain, de violations des droits fondamentaux de l’accusé, et de la disproportion entre les faits reprochés et les peines requises.

Aujourd’hui, c’est au tour de Rexhino Abazaj, dit « Gino », d’être menacé par la Hongrie orbaniste. Arrêté à Paris la semaine du 11 novembre et sous le coup d’un mandat d’arrêt similaire, il est depuis emprisonné à la prison de Fresnes, où il attend la décision d’un tribunal français sur la demande d’extradition hongroise. Après une première audience lors de laquelle ses avocats et lui ont pris connaissance de la requête, une seconde doit être organisée le 18 décembre pour statuer sur son sort.

Nous appelons tous les citoyens européens et les citoyennes européennes à se mobiliser pour soutenir ce militant antifasciste et pour lutter contre la menace que l’extrême-droite orbaniste fait peser sur l’équité des procédures judiciaires en Europe.

Lire la liste des signataires sur Mediapart

Soutenez les combats de la LDH

Les droits et les libertés ça n’a pas de prix, mais les défendre a un coût.