L’Association européenne pour la défense des droits de l’Homme (FIDH-AE) exprime son émotion face à l’attentat monstrueux dont ont été victimes des Américains, mais aussi des étrangers, aux États-Unis. Elle réaffirme, avec l’ensemble des ligues des droits de l’Homme et des associations qui la composent, qu’aucun combat ne justifie la violence criminelle, et condamne avec fermeté toutes les formes de terrorisme, d’où qu’elles émanent. Les auteurs et complices de ces actes doivent être poursuivis. À cette fin, le principe d’une coopération internationale paraît totalement justifié et la FIDH-AE approuve la mobilisation des États de l’Union européenne sur cet objectif. Mais l’allégation rhétorique d’un « état de guerre », non fondée du point de vue du droit international en l’absence d’un État agresseur, et l’activation des accords internationaux qui s’en est suivie, en particulier l’application de l’article 5 du traité de l’OTAN, conduit à des conséquences exceptionnelles et imprévisibles qui suscitent les plus vives inquiétudes et réserves. Le caractère inconditionnel de la solidarité annoncée pourrait revenir à légitimer toute initiative du gouvernement américain, au risque d’attaquer un État prétendument tenu pour responsable des actes terroristes. Si l’on suit ce raisonnement, en visant des ennemis présumés, on entretient l’amalgame entre, d’une part, une religion, un peuple, les habitants d’un pays ou d’une région et, d’autre part, les auteurs et complices des attentats. Dans cet esprit, on doit aussi mettre en garde contre la pratique des rumeurs et contre l’absence de rigueur avec laquelle la diffusion de certaines informations tend à désigner des coupables naturels. Un tel climat, de telles politiques, ne peuvent que contribuer à exacerber des tensions entre, d’une part, des peuples ou des collectivités qui, parce que parmi les plus démunies, se vivent comme méprisées et dominées, et, d’autre part, les « nantis ». On risque dès lors de tomber dans un cercle vicieux de violence et de terrorisme réciproques. Il nous faut par ailleurs tout mettre en œuvre pour éviter d’importer des tensions et conflits inter-communautaires sur nos territoires, et pour favoriser un dialogue qui permette à tous de vivre ensemble. La logique de guerre risque, en outre, de servir d’alibi à une politique sécuritaire, au préjudice du respect fondamental des libertés individuelles. La volonté de coopération internationale, même dans le domaine du terrorisme, ne peut en aucun cas justifier de s’abstenir des règles de droit. L’Association européenne pour la défense des droits de l’Homme demande instamment aux États de l’Union européenne qui se revendiquent de la coopération internationale de ne pas s’engager dans la spirale de la violence et de l’intolérance. Elle s’élève à l’avance contre toute action punitive qui frapperait des personnes considérées comme coupables sans jugement, ou des personnes qui, alors qu’elles sont déjà quotidiennement victimes de violations de leurs droits fondamentaux, n’auraient que le tort d’habiter un territoire et d’appartenir à une religion, à une communauté, et qui seraient donc simplement une nouvelle fois victimes.