La citoyenneté européenne affirmée depuis le traité de Maastricht et proclamée par la Charte des droits fondamentaux doit avoir un contenu. Il ne s’agit pas seulement de « fonctionnement » démocratique. Il s’agit de prendre le contre-pied du Livre blanc sur la gouvernance du 25 juillet 2001 qui souhaite l’application de recettes de managment, pour améliorer le « fonctionnement » des institutions. L’objectif de « rapprocher » l’Europe de ses habitants, baptisés « citoyens », est également insuffisant. Il faut introduire la notion de politique dans l’Union européenne, admettre qu’il y a des choix politiques, le libéralisme n’étant pas le seul horizon possible. La démocratie, c’est alors d’offrir aux citoyens dans le vrai sens du terme, qui participent à la conduite de la cité, un choix entre plusieurs politiques. La Communauté européenne a mis en place deux organes qui procèdent d’une expression démocratique : le Parlement européen et le Conseil des ministres. Mais, et c’est encore plus vrai pour la Commission, il ne s’agit que d’une forme indirecte de démocratie. Les citoyens choisissent, dans le cadre national, entre des partis nationaux, sur des options nationales, qu’il s’agisse des gouvernements de leur État ou même des députés européens. Ils n’ont donc pas, à juste raison, l’impression d’avoir prise sur des choix qui se présenteraient au niveau européen. Lorsque le Livre blanc propose de revenir au fonctionnement originel du système communautaire, il accepte que la démocratie n’existe qu’au niveau national, la Communauté européenne étant gérée par les gouvernements nationaux. Cela ne serait acceptable que si la Communauté européenne avait, comme à l’origine, une compétence limitée, l’essentiel des décisions revenant aux États. Ce n’est plus le cas. Dès lors que des choix politiques d’importance sont faits au niveau européen, non seulement sur le plan économique mais sur la justice, les services publics, la politique sociale, etc., ils doivent nécessairement être effectués par une autorité démocratiquement légitime. Pour qu’il y ait démocratie, il faut que les pouvoirs exécutifs et législatifs émanent du suffrage universel et que chacun ait sa place entière, ce qui n’est pas le cas, aujourd’hui, du Parlement européen. Pour y arriver, il ne suffit pas de « simplifier les traités », ce qui n’est qu’une amélioration technique, il faut engager une réflexion qui associe les acteurs et contre-pouvoirs de la société civile, pour définir les formes d’une démocratie véritable.