Un peu plus de 200 personnes sont emprisonnées à Guantanamo à Cuba, dans une prison spécialement construite pour eux. Transférés d’Afghanistan, ces prisonniers sont devenus propriété des USA. qui se réservent le droit de définir leurs conditions de détention et leur statut. Les quelques efforts de communication des autorités des États-Unis ne laissent pas d’inquiéter : prisonniers en chaînés, yeux bandés, etc.…un système d’enfermement déshumanisant destiné tout autant à garantir la sécurité (dont on se demande bien ce qui peut la mettre en danger au milieu d’une base américaine déjà surprotégée) que de briser toute volonté chez ces détenus. Un français est emprisonné quant à lui en Virginie et risque la peine de mort. Tout cela est inacceptable. Les États-Unis n’ont aucune légitimité à déterminer ce qu’est le droit de la guerre et de le transformer à leur guise. Les conventions internationales doivent recevoir application en toutes circonstances et nul n’est habilité à déroger. Les combattants emprisonnés à Cuba sont des combattants qui doivent être considérés comme des prisonniers de guerre. Si des crimes de guerre ou d’autres plus graves encore peuvent leurs être reprochés, il faut qu’ils soient jugés par des tribunaux impartiaux et indépendants. Et certes pas par les juridictions militaires d’exception que le président Bush a décidé de créer. Et le mieux serait l’intervention d’une juridiction pénale internationale ad hoc afin de garantir que le procès qui sera fait ne sera pas envahi pas le ressentiment, au demeurant bien naturel, des Etats-Unis ; Quant à Zacarias Moussaoui, on peut douter, là aussi, qu’un tribunal des états-Unis, fût-il comme en l’espèce civil et fédéral, puisse avoir l’objectivité nécessaire pour juger en toute impartialité. Pour tous, enfin, la peine de mort ne saurait s’appliquer. Rappeler ces quelques principes, ce n’est pas s’apitoyer sur le sort de ces personnes, oubliant les victimes ou l’insupportable idéologie qui anime les talibans ou El Quaïda : c’est réaffirmer que nos principes ne se divisent pas et que l’on ne peut lutter au nom des principes démocratiques en refusant le bénéfice de ceux-ci aux adversaires de la démocratie. En considérant que les étrangers ne peuvent bénéficier des mêmes garanties que les citoyens américains, George Bush manifeste une conception impériale du rôle de son pays qui nie l’universalité des droits de l’Homme. Bien pire, il renvoie à tous ceux qui dans le monde entier ont, à juste titre, quelques raisons de se méfier de cette politique impériale, l’image d’une justice inégale qui a pour corollaire une politique de deux poids deux mesures dont l’élément déterminant reste le seul intérêt des états-Unis. En agissant de cette manière, on prend le risque délibéré de produire d’autres fous que l’on s’ingéniera à réprimer encore plus, entrant par-là dans une spirale que l’on connaît bien. Nous devons refuser ce processus. D’abord, et très simplement, parce qu’il est contraire à tous principes. Ensuite, parce qu’il est patent qu’il n’en ressortira rien de moins que d’autres drames. Qui peut trouver des excuses aux exactions des régimes de Corée du Nord ou d’Irak ? Qui n’a conscience qu’une aventure militaire isolée, et sans doute victorieuse, des États-Unis n’aurait d’autres effets qu’un désastre politique ? En ce domaine, l’UE a un rôle majeur à jouer en s’opposant à cette politique et pas seulement en protégeant les ressortissants européens actuellement entre les mains des états-Unis. S’il existe une possibilité que les États-Unis en reviennent au respect des règles internationales, c’est d’abord au peuple américain lui-même de la mettre en œuvre. Ensuite, c’est à l’UE d’exprimer de manière forte que ce chemin là n’est pas possible. Le ministre des Affaires étrangères de la France, Hubert Védrine, l’a dit clairement et on doit souhaiter qu’il sera entendu par tous les pays de l’UE.