Résolution adoptée par le 82ème congrès de la LDH, Evry – 7, 8 et 9 juin 2003
Depuis l’été dernier, le gouvernement s’est engagé dans une politique fortement médiatisée de lutte contre la présence des Rroms roumains en France. Il n’hésite plus à jouer d’amalgames douteux et infondés. L’Etat se focalise sur 3 à 4000 personnes en France, au prix d’impressionnants et coûteux moyens policiers.
Les expulsions des terrains, sur lesquels ces familles survivent, se multiplient dans des conditions de plus en plus violentes. Elles s’accompagnent de fouilles y compris des mineurs, d’arrestations collectives, d’interpellation d’un enfant à l’école, de placements en centres de rétention de personnes présumées en situation irrégulière, en vue de les renvoyer en Roumanie.
De nombreux Rroms roumains présents sur le territoire français depuis moins de trois mois sont en règle. Des arrêtés préfectoraux de reconduite à la frontière sont notifiés, sans examen approfondi des situations individuelles, ceci malgré des séjours anciens en France. Ces dispositifs d’expulsion sont alors inopérants.
Faute d’autres arguments, l’insuffisance de ressources est maintenant invoquée comme nouveau justificatif de reconduite à la frontière, créant de fait un délit de pauvreté. Quand des « charters » pour la Roumanie sont tout de même prévus, ces procédures approximatives conduisent les tribunaux à les annuler.
Résultat de ces opérations d’évacuation : environ 1500 personnes expulsées de leurs lieux de vie, 30 renvoyées en Roumanie. Le bilan humain est évidemment catastrophique tant est grande la violence psychologique et parfois physique de ces expulsions. Ce qui faisait office d’habitat est fréquemment détruit avant même que les familles ne puissent y récupérer leurs affaires personnelles.
Parallèlement, dans le métro ou sur les terrains, des pressions de tous ordres sont mises en œuvre ; les Rroms se voient confisquer leur argent et certains biens, leurs instruments de musique sont parfois brisés au cours de contrôles de plus en plus fréquents, des cas de passeports déchirés sont aussi relevés.
De tels actes volontaires et prémédités sont inacceptables. Ces atteintes aux droits les plus fondamentaux font des Rroms les « parias » de notre temps, rejetés de tous.
Partout dans l’Union Européenne, les expulsions incessantes, les interventions répétées des forces de l’ordre, les destructions de caravanes, les reconduites de quelques uns à la frontière n’ont abouti qu’à stigmatiser toujours plus une population déjà très fragilisée.
Il est urgent de prendre la mesure de la question Rrom au sein de l’Europe. Avec l’élargissement en 2004, puis en 2007 pour la Roumanie, il ne s’agit plus d’y répondre en terme de nouvelles lois restrictives sur l’asile et l’immigration comme celles en préparation.
L’enjeu est désormais de définir les modalités d’intégration d’une minorité reconnue comme telle par les institutions internationales et de mettre en œuvre les moyens de rendre effective et réelle l’égalité des droits entre tous les ressortissants européens.
La Ligue des droits de l’Homme réunie en Congrès à Evry dénonce cet aveuglement des pouvoirs publics et les mesures indignes mises en œuvre pour éloigner des familles Rroms du territoire français, traitées en véritables parias.
Elle demande en urgence, l’arrêt des expulsions des terrains sans solution d’hébergement pérenne, des mesures pour un accueil digne avec scolarisation et accès aux soins et l’abandon de la référence à la notion de pays sûr pour les demandes d’asile avec un retour aux examens individuels des situations.
La LDH, en lien avec la FIDH-AE et la FIDH, appelle à l’engagement d’une réflexion européenne intergouvernementale sur la libre circulation et la libre installation des Rroms en Europe et l’application urgente de mesures de lutte contre les discriminations.