Le Conseil constitutionnel vient de rendre, sur la loi relative à la « rétention de sûreté », une décision politiquement très habile. Sauvant la face du gouvernement, il empêche l’application immédiate d’un texte extrêmement dangereux et rend cette application très difficile même à terme.
Mais cette décision habile est aussi une décision fort politicienne. En déclarant que l’enfermement à vie d’une personne n’est pas une peine, le Conseil vient de donner à la notion de « mesure de sûreté » une extension incompatible avec la protection des droits de l’Homme. Mettant la « sûreté » au-dessus de la liberté, il méconnaît la hiérarchie proclamée par l’article 2 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen. Vidant de toute effectivité le principe fondamental de la légalité des peines (article 8 de la Déclaration), il déblaie un chemin législatif qui mène à un hygiénisme totalitaire.
La LDH regrette vivement que ce choix, mûrement pesé, soit celui d’une instance politique sachant ménager ses puissants interlocuteurs, pas celui d’une juridiction gardienne des droits et libertés des citoyens. Depuis de longues années, ces libertés sont toujours davantage rognées et menacées par chaque loi pénale ; et chaque décision subséquente relève du pâté de cheval (de validation) et d’alouette (de timides réserves). Admirables subtilités, mais aujourd’hui ce n’est pas de virtuoses de la casuistique dont la République a besoin, mais d’une véritable Cour constitutionnelle. Pendant qu’il en est encore temps.
Paris, le 22 février 2008