Communiqué du collectif Romeurope
Le Collectif Romeurope se souvient du 4 novembre 2002.
Ce matin-là, l’Abbé Pierre était venu rendre visite aux Rroms du bidonville de la voie des Roses à Choisy-le-Roi, témoignant ainsi avec simplicité de sa solidarité de coeur et de rue, envers ceux que l’Etat voulait encore et toujours stigmatiser.
Il avait choisi d’être parmi eux pour proposer avec force un amendement à l’assemblée nationale qui débattait d’une loi visant à pénaliser les sans abris et sans ressources :
« Nul ne peut être poursuivi pour avoir mendié, cherché un abri dans un logement ou un terrain non occupé, s’il ne lui a été proposé un moyen digne de subsistance et de logement. La responsabilité de l’Etat et des collectivités territoriales peut être engagée pour non assistance à personne en situation d’exclusion ou à toute personne dont la détresse financière est exploitée. »
Malgré ce coup de gueule, la proposition de l’abbé fut finalement rejetée.
Dix jours plus tôt, le déjà ministre de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy était également venu à Choisy-le-Roi, mais son choix était différent. Il avait visité un bidonville voisin que des dizaines de familles rroms venaient d’abandonner suite à un incendie partiel et sous forte pression policière. Ce terrain était vide des personnes, mais on y sentait la présence récente de dizaines de familles parties errer dans le froid. M. Sarkozy ne s’y exprima que sur le devoir effectué et l’ordre retrouvé, sans aucun mot pour les personnes qui peu de temps avant vivaient là dans le plus grand dénuement, passant 100 mètres plus loin sans s’arrêter devant le terrain de la voie des Roses où les Rroms l’attendaient.
Pour les Rroms, la rencontre du 4 novembre 2002 avec l’Abbé Pierre fut un grand moment d’espoir et de réconfort. Ils retrouvèrent auprès de lui toute la dignité et le respect que son humanité savait offrir et que tant d’autres leur refusaient. Hélas, le soutien de l’Abbé fut insuffisant pour contrer la volonté de ceux qui voulaient voir disparaître les Rroms de ces lieux. Un mois plus tard, à l’aube, les forces de l’ordre encerclaient le terrain et tous furent expulsés sans solution. En 2007, la politique d’expulsion sans solution est inchangée : le jour de la mort de l’Abbé Pierre, les Rroms qui s’étaient installés sur un terrain sur le territoire de la commune de Palaiseau (91) ont été expulsés sans solution.
Le Collectif Romeurope rend hommage à celui qui a su être présent auprès des plus pauvres, présence que n’ont que trop rarement assumée les hommes politiques auprès des Rroms migrants en France. Sa disparition laisse un grand vide, mais son juste combat reste entier, qu’il revient à chacun désormais de porter.
Paris, le 24 janvier 2007