Monsieur le Président,
La Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et son organisation membre, la Ligue française des droits de l’Homme (LDH), sont vivement préoccupées par la situation au Togo et appellent les autorités françaises à dénoncer publiquement les fraudes constatées lors du scrutin présidentiel et à condamner les graves violations des droits de l’Homme qui ont précédées et suivent les élections.
Les élections présidentielles au Togo se sont déroulées en violation du droit à des élections libres et pluralistes consacré par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Des fraudes massives ont été constatées par des observateurs indépendants avant et pendant le vote du 24 avril 2005 : bourrages d’urnes, manipulation des listes électorales, distribution en grand nombre de cartes électorales vierges aux partisans du parti au pouvoir, comptage des votes dans le plus grand secret, intimidations des partisans de l’opposition, interventions de militaires et de civils armés afin de prendre possession d’urnes électorales, etc. (Cf. communiqué de la FIDH du 26/04/05 ci-joint en copie).
Depuis l’annonce officielle de la victoire du candidat Faure Gnassingbe, les villes de Lomé, Tapamé, Kpalimé et Kpelé, connaissent des affrontements violents entre les forces de l’ordre et les jeunes manifestants qui contestent dans les rues la validité des résultats du scrutin. Selon les informations reçues, on dénombrerait, à ce jour, au moins 27 morts et plus d’une centaine de blessés. La situation ne cesse de se dégrader.
Les défenseurs des droits de l’Homme, plus particulièrement ceux qui ont condamné les graves violations des droits de l’Homme commises par les autorités nationales depuis la tentative de coup d’Etat de Faure Gnassimgbe le 5 février 2005, sont en grande insécurité (Cf. Communiqué de l’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme du 27 avril 2005 ci-joint en copie). Plusieurs d’entre eux font état de menaces contre leur intégrité physique et, face à l’intrusion répétée de forces de l’ordre et de miliciens à leur domicilie, sont contraints de se cacher.
Nos organisations constatent également de graves violations au droit à l’information : les médias indépendants ont été fermés, des correspondants de la presse internationale ont été empêchés de se rendre dans le pays et font l’objet de menaces. Les moyens de communication tels que les téléphones mobiles, les fax et internet sont coupés depuis le milieu de l’après-midi du 24 avril 2005.
Ainsi, La FIDH et la LDH déplorent la caution regrettable apportée à ce stade par la France à cette mascarade électorale et sa faible réaction face aux violences en cours. Pourtant cette situation nécessite des plus hautes autorités françaises une condamnation ferme des violations graves des droits de l’Homme commises par les autorités nationales togolaises au risque de se voir accusées de complaisance, voire de complicité.
Nous vous prions, Monsieur le Président, d’agréer l’expression de notre haute considération.
Michel Tubiana Sidika Kaba
Président de la LDH Président de la FIDH
Paris, le 28 avril 2005