Texte adopté à l’unanimité par le Comité central de la LDH (27 janvier 2007)
Dans la période de campagne électorale qui va s’ouvrir en France, de nombreuses questions et interpellations seront adressées aux candidats. Plusieurs porteront évidemment sur la situation internationale, et en particulier sur la situation au Proche-Orient. La Ligue des droits de l’Homme est membre de la Plate-forme des ONG françaises pour la Palestine et du Collectif pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens qui se battent pour un accord de paix fondé sur le plein respect du droit international permettant la constitution, à coté de l’Etat d’Israël, d’un Etat palestinien libre et souverain avec Jérusalem comme capitale de chaque Etat. C’est cette orientation générale qui donne un cadre à l’analyse et aux propositions que la LDH, fidèle à sa vocation de défenseur généraliste des droits de l’Homme, souhaite soumettre à la réflexion des candidats.
La LDH entend rappeler, en préalable, que chacun est comptable des moyens qu’il emploie et que la sécurité de l’Etat d’Israël ne saurait justifier le recours aux crimes de guerre pas plus que le droit à la résistance du peuple palestinien ne saurait justifier de s’en prendre à des civils. Parce que chaque vie a la même valeur, la LDH refuse de se livrer à un exercice d’arithmétique entre des drames réciproques, ce qui ne peut conduire qu’à absoudre l’insoutenable d’où qu’il vienne. Elle n’entend pas, cependant, mettre à égalité celui qui occupe et celui qui est occupé. En rappelant ces principes, la LDH ne fait pas le choix d’un camp contre un autre. Elle choisit le camp du droit.
La LDH souligne qu’aucune solution ne peut résulter d’actions militaires et que c’est au contraire en s’appuyant sur le respect des résolutions pertinentes des Nations unies que les peuples du Proche-Orient pourront construire un avenir de paix.
Aujourd’hui, la situation du peuple palestinien est la traduction d’injustices permanentes et répétées, d’humiliations, de dénis du droit, aggravés par un recours quotidien à la force toujours plus inacceptable : c’est un peuple tout entier qui ne peut travailler, se déplacer, se soigner ou s’éduquer ; qui, tout simplement, ne peut pas vivre. C’est pourquoi la LDH souhaite que cesse la politique internationale de « deux poids deux mesures », notamment dans l’application des résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies.
Ces résolutions concernent notamment le retrait d’Israël des territoires occupés depuis 1967 (résolution 242) mais aussi, explicitement la création d’un Etat palestinien (résolution 1397 votée en 2002). La création d’un Etat palestinien viable à Gaza et en Cisjordanie est un droit incontestable et l’abandon de toutes les colonies en est le corollaire indispensable.
De même, la LDH insiste sur le fait que la Cour internationale de justice a, en 2004, déclaré illégale la construction du mur dit « de sécurité » et fait obligation au gouvernement israélien de le démanteler.
Si les décisions de l’ONU prévoyaient, en 1948, un statut international pour Jérusalem et les lieux saints, il n’est sans doute pas d’autre solution possible aujourd’hui que la partition de Jérusalem et la garantie d’accès pour tous à tous les lieux saints. Le sort des réfugiés palestiniens ne peut être réglé sans que leur soit reconnu le principe du droit au retour et à indemnisation dont les modalités doivent être négociées entre les parties.
Enfin, il est évident que la constitution d’un Etat palestinien viable ne peut s’accommoder d’une politique de colonies qui transforme le territoire de la Cisjordanie en un patchwork de zones à statuts différenciés. Cette politique est d’ailleurs rejetée aussi bien par les instances internationales que par une part importante du mouvement de la paix israélien. La LDH rappelle que c’est à la communauté internationale qu’il appartient d’interrompre l’appropriation des terres par Israël qui ne cesse de s’étendre, et d’imposer la présence d’une force de protection.
Par ailleurs, l’accord d’association qui existe entre Israël et l’Union européenne peut être aujourd’hui utilisé comme un moyen de pression pour que le gouvernement israélien revienne sur ses pratiques de colonisation, d’expropriations et de destructions. L’absence de réaction de la part de l’Union européenne est évidemment lue comme une approbation tacite. C’est pourquoi la LDH considère que la suspension de cet accord qui a été votée par le Parlement européen en 2002 de même que le gel des relations militaires entre les pays de l’Union et Israël peuvent contribuer à faire changer la politique du gouvernement israélien, sans qu’il soit pour autant question de boycotter ce pays ce qui ne conduirait qu’à inciter un peu plus la société israélienne au repli sur soi et à y affaiblir les forces de paix.
Plus généralement, l’Union européenne doit poursuivre son assistance au peuple palestinien et peser en faveur d’une solution politique. La suspension des aides à l’Autorité palestinienne au motif que le vainqueur des élections législatives ne lui convenait pas, n’a pas renforcé la crédibilité de l’Union européenne et a, au contraire, renforcé les extrêmes. L’Union européenne doit rétablir ses aides et la communauté internationale doit obtenir du gouvernement israélien qu’il restitue l’intégralité des droits de douane qu’il retient indûment.
Il est enfin indispensable que des initiatives plus marquantes soient prises dans la période future pour arrêter l’engrenage de la violence et du désespoir. L’envoi d’une force multinationale de protection et d’interposition sous l’égide de l’ONU pourrait être l’une de ces initiatives, assurant une sécurité aux deux populations, dans une logique bien différente de la logique d’exclusion et de ségrégation, qui est celle du « mur ». De même, l’Union européenne, étant donné l’importance de ses liens économiques et historiques tant avec Israël qu’avec la Palestine pourrait utilement œuvrer à la tenue d’une conférence internationale pour une paix israélo-palestinienne.
Face à une situation qui paraît bloquée, en particulier avec la division des dirigeants palestiniens et l’entrée de l’extrême droite au gouvernement israélien, face aux drames humains que cela engendre, il est plus que jamais nécessaire de renforcer le camp de ceux qui en Israël et en Palestine luttent pour une paix fondée sur le droit, le respect de deux peuples et la reconnaissance mutuelle de deux Etats.
Texte adopté à l’unanimité au Comité central du 27 janvier 2007.