Tribune de François Chérèque, secrétaire général de la CFDT, d’Alain Olive, secrétaire général de l’UNSA, de Bernard Thibault, Secrétaire Général de la CGT et de Jacques Voisin, président de la CFTC parue dans Libération le 5 novembre 2004.
« Vivre ensemble, libres, égaux et solidaires», voilà une grande ambition! Profondément attachées aux valeurs de fraternité et de solidarité, nos organisations syndicales sont pleinement parties prenantes de la manifestation du 7 novembre. Nous manifesterons contre tous les racismes, contre l’antisémitisme et contre toutes les discriminations raciales, ethniques, sexistes ou en raison de l’orientation sexuelle. L’augmentation des faits de cette nature, ces derniers mois, est malheureusement une réalité qui doit être dite et reconnue. Cette situation exige une mobilisation et un sursaut de l’ensemble de la société française. Le syndicalisme et, à travers lui, les nombreux salariés qui s’y impliquent ou s’y reconnaissent ont une responsabilité de premier plan face à cet enjeu.
Nous l’avons dit et le réaffirmons : participer à ces manifestations, c’est s’engager à faire vivre concrètement cette ambition. Aussi, chacun doit s’interroger sur ses propres responsabilités. Cette exigence, nous entendons d’abord nous l’appliquer à nous-mêmes ! Car les faits sont là. Le monde du travail et les salariés ne sont pas imperméables aux idées et aux pratiques de rejet de «l’autre», considéré parfois comme inférieur ou très souvent comme différent. Les syndicats sont en «première ligne» sur ce terrain, nous avons donc la responsabilité d’agir.
Aujourd’hui, le racisme et la discrimination sont le lot quotidien réservé à de nombreux salariés, dans leurs entreprises. Ainsi, à côté du racisme «ordinaire», vexations, injures, inscriptions diverses, actes intolérables et condamnables en eux-mêmes, des pratiques plus ou moins masquées ou avouées se donnent libre cours avec pour conséquence la discrimination à l’embauche, dans la répartition des tâches et des entraves à l’évolution des carrières des salariés. Dans certains services publics, nous pointons aussi, ça et là, des comportements inadmissibles dans l’accueil réservé à des étrangers ou «supposés comme tels», du fait de leur apparence, leur couleur de peau, leur nom.
Les formes de discrimination sont multiples, nos réactions et nos actions doivent l’être aussi. Nous ne devons pas nous satisfaire des seuls beaux sentiments ou des beaux discours.
Fidèles aux valeurs et à l’histoire du syndicalisme, nous nous engageons à renforcer la lutte contre tous les racismes, contre l’antisémitisme et les discriminations, en agissant sur les comportements, les attitudes, les mentalités et les pratiques, avec la volonté de faire bouger les choses. Cela passe par un travail en profondeur d’éducation, de formation et de sensibilisation.
Certains employeurs déclarent vouloir se mobiliser et agir en ce sens. Nous disons «chiche» ! Pour faire en sorte que la lutte contre les discriminations et la promotion d’une égalité effective dans les entreprises deviennent un vrai sujet de négociation et de dialogue social. Mettre ainsi tous les acteurs face à leurs responsabilités est le seul moyen de rompre avec des logiques discriminatoires qui taraudent l’ensemble du corps social, de l’école à l’emploi en passant par le logement. L’Etat et les employeurs publics doivent aussi s’engager dans ce combat. Nous comptons tout mettre en œuvre pour que là aussi les choses changent.
Au-delà des manifestations du 7 novembre, c’est par des actes quotidiens et par notre travail dans la durée que nous donnerons corps à cette volonté de lutter contre tous les racismes, conformément aux engagements pris par l’ensemble du mouvement syndical européen au sein de la Confédération européenne des syndicats.
Par François CHÉRÈQUE secrétaire général de la CFDT, Alain OLIVE secrétaire général de l’UNSA, Bernard THIBAULT Secrétaire Général de la CGT et Jacques VOISIN président de la CFTC