Communiqué commun
La réunion du « G5 », regroupant il y a quelques jours sous la présidence de Nicolas Sarkozy, les ministres de l’Intérieur allemand, britannique, espagnol, français et italien, a débouché sur l’annonce de vols charters communs à différents pays européens pour organiser l’expulsion d’étrangers à grande échelle et à moindres frais. Le retour des « charters » chers à Charles Pasqua se fera donc – « c’est une question de jours » selon le ministre italien – au niveau européen.
Cette réunion a été aussi l’occasion de déclarations qui confirment le durcissement de la politique gouvernementale. Monsieur Sarkozy a déclaré que les sans-papiers « n’ont pas vocation à se maintenir en violation de nos lois, ils seront raccompagnés », a annoncé une augmentation de 50% du nombre d’expulsions par rapport à l’année dernière. Il a enfin saisi cette occasion pour jeter une nouvelle passerelle xénophobe pré-électorale : « quand on vit en France […] on aime la France, si on n’aime pas la France […] personne ne vous oblige à rester ». On aura reconnu le slogan lepéniste « la France, aimez-la ou quittez-la »…
Pour faire bonne mesure, il a aussi évoqué des « abus » du regroupement familial, ce qui prépare l’opinion à sa remise en cause, et a annoncé une sélection renforcée de l’accès aux études en France : « nous voulons les meilleurs étudiants du monde et pas ceux dont personne ne veut ». Comme avec la politique des quotas, la France entend donc « faire son marché » dans les pays du sud. Reste à savoir si les épreuves de sélection seront organisées par la police de l’air et des frontières ou si Monsieur Sarkozy aura l’extrême bonté de laisser les universités faire leur métier sans lui rendre de comptes…
Ainsi, pendant que le ministère de l’Intérieur fait miroiter quelques espoirs de retouches marginales à une situation dont il reconnaît le caractère « injuste » et misérable, le ministre fixe clairement la véritable perspective du gouvernement Villepin : l’expulsion de tous les sans-papiers et le renforcement de la logique de forteresse, de surcroît européanisée.
Ce double langage ne fera pas illusion à ceux qui se rappellent l’annonce d’une prétendue suppression de la « double peine » il y a trois ans et qui constatent ce qu’il en est aujourd’hui : quels que soient les talents du bateleur, les vieilles ficelles finissent par s’user.
On nous annonce pour septembre une circulaire qui se bornerait à prendre en compte quelques cas particulièrement scandaleux. Nous réaffirmons que seule la régularisation globale peut mettre fin à une situation humainement insupportable et ingérable. Dès lors, aucune de nos organisations ne saurait participer de près ou de loin, à l’élaboration d’instructions nouvelles qui relèvent de la responsabilité du seul gouvernement. Nous jugerons l’arbre à ses fruits, et la circulaire à son application.
Il reste que l’été est propice aux mauvais coups portés aux plus fragiles en escomptant que la période des vacances affaiblirala solidarité. Pour dénoncer ce piège et refuser que des centaines de sans-papiers soient sacrifiés à des ambitions et à des perspectives électoralistes tranquillement assumées, les organisations de soutien au mouvement des sans-papiers demandent dès maintenant, parce qu’elles refusent le double langage, un moratoire sur toute expulsion jusqu’à publication de la circulaire annoncée et réexamen des dossiers concernés, et appellent à un rassemblement de protestation contre les charters d’expulsés lundi 25 juillet à 18 heures devant l’Hôtel Matignon.
Rassemblement : métro rue du bac, lundi 25 juillet à 18h
Organisations signataires : ALIF, les Alternatifs, ATF, CACHAN, CEDETIM, CGT, CMF, Collectif de soutien des exilés du Xe arrondissement, Droits Devant !, FASTI, FTCR, GISTI, IPAM, LCR, LDH, MJS, MRAP, PCF, Sud Education, Sud PTT, Syndicat de la Magistrature, Union syndicale Solidaires, les Verts, 3ème collectif sans papiers, CSP 92, CSP 19e, CSP 11e, CSP 18e, CSP 77, CNSP
Paris, le 21 juillet 2005