Lettre ouverte du collectif UCIJ
Monsieur le ministre,
L’UCIJ, qui rassemble 800 organisations, vous demande de bien vouloir remettre en liberté M. MESSAMER et ne pas procéder à son départ forcé du territoire français. En 2003, vous avez crié haut et fort qu’il fallait abroger la « double peine » lorsqu’elle touchait des personnes ayant de très fortes attaches en France. Effectivement, sans supprimer cette « double peine », le législateur a aménagé le dispositif en créant des catégories de personnes à l’abri de l’interdiction du territoire français – prononcée par le juge pénal – et de l’expulsion (sous quelques réserves). Aujourd’hui M. MESSAMER ne pourrait plus être condamné à une interdiction du territoire français, comme il l’a été il y a plus de quinze ans maintenant.
En 2003, le législateur avait aussi prévu des dispositions transitoires visant à revoir les situations de personnes déjà condamnées ou sous le coup d’un arrêté d’expulsion. On sait qu’en réalité les mesures de départ forcé concernant des étrangers ayant leur vie en France n’ont pas toutes, loin s’en faut, été remises en cause par les autorités compétentes. Double mensonge : avoir fait croire que la double peine avait été abolie et laisser entendre un règlement du « passif ». Tel n’a pas été le cas (v. « Le livre noir de la double peine – Le combat d’un mensonge », mars 2006).
A l’heure même où vous entendez afficher votre humanité en faisant croire à des milliers de familles qu’elles seront régularisées, les pouvoirs publics s’apprêtent à expulser un homme, installé en France depuis des années, marié à une Française, parent de trois enfants français (dont la petite dernière âgée de 6 ans scolarisée). Pendant 13 ans, M. MESSAMER a vécu avec son interdiction du territoire français, jamais mise à exécution, en restant aux côtés des siens. Il a su, malgré cette peine contraire à toute idée d’amendement, se reconstruire socialement, en créant sa propre entreprise. Il n’a plus jamais eu affaire à la justice depuis cette unique condamnation. Mardi 27 juin, une brigade de police est venue à son domicile, défonçant sa porte avec violence en présence de toute la famille particulièrement choquée. Maintenant M. MESSAMER est retenu au centre de rétention du Mesnil Amelot et attend dans la peur d’être éloigné des siens pour un délit pour lequel il a fait deux ans de prison il y a plus de 15 ans…
L’UCIJ vous demande de façon solennelle de donner les instructions nécessaires afin que M. MESSAMER soit remis en liberté, « libéré » enfin de cette interdiction du territoire français et mis en possession d’un titre de séjour auquel il a droit en vertu de la loi.
Soyez assuré Monsieur le ministre de toute notre considération.
Pour l’UCIJ,
Nathalie Ferré