L’opération de régularisation entreprise sur la base de la circulaire du ministre de l’Intérieur n’a pas résolu le problème qu’avaient posé avec vigueur en 1996 les occupants de l’église Saint-Bernard à Paris. Plus de 70.000 personnes qui ont présenté leurs dossiers et qui répondaient aux critères définis tant par le collège des médiateurs que par la Commission nationale consultative des droits de l’homme se retrouvent aujourd’hui renvoyées vers la clandestinité officielle et le désespoir.
A travers tout le pays se développent des mouvements de protestation, manifestations de soutien, parrainage, occupations, et aujourd’hui grèves de la faim de dizaines de personnes particulièrement déterminées. Le gouvernement ne peut rester passif et silencieux en comptant comme le firent trop souvent ses prédécesseurs sur la passivité de l’opinion voire sa lassitude. Va-t-il falloir une nouvelle fois attendre que des vies soient menacées pour qu’une réponse appropriée soit envisagée ?
La Ligue des droits de l’homme a constaté que c’est l’arbitraire qui semble avoir présidé aux réponses faites par les préfectures : inégalité de traitement selon les lieux et parfois même dans une même préfecture, exigences manifestement impossibles à satisfaire de production de certains documents et rejet d’autres moyens de preuves etc. Les recours actuellement susceptibles d’être formés contre les décisions de refus sont soumis à des délais incertains et leur résultat est d’autant plus aléatoire qu’il n’existe aucune garantie d’un examen objectif et contradictoire.
La Ligue des droits de l’homme demande que soit mise en place au plus vite une instance de recours composée de magistrats ou de personnalités incontestables qui pourra examiner tous les dossiers déposés dans le cadre de la circulaire Chevènement et qui ont fait l’objet d’une décision de rejet.
Le gouvernement ayant récemment fait savoir aux sans-papiers en lutte que les ’ critères retenus ont été définis à partir des propositions formulées par la Commission nationale consultative des droits de l’homme dans son avis d 12 septembre 1996 ’, c’est donc sur la base de ces propositions et de celles, proches, du collège des médiateurs que l’instance de recours devrait examiner les critères dont on pourrait prouver par tous moyens l’existence.
Il faut mettre fin à l’arbitraire administratif en ce qui concerne les étrangers. C’est depuis 1904 que la Ligue des droits de l’homme le demande.
Paris, le 23 juin 1998