Communiqué de la LDH
Sous les masques rassurants de la « vidéoprotection » et de la « vidéotranquillité » (sic), les caméras de surveillance prolifèrent. Le gouvernement annonce leur triplement sur les voies publiques, et le conseil de Paris a approuvé un plan de la préfecture de police implantant 1 226 caméras supplémentaires dans les rues et sur les places parisiennes.Et pourtant, même un rapport du ministère de l’Intérieur montre que la vidéosurveillance n’entraîne pas de baisse significative des chiffres de la délinquance : l’impact des caméras est faible, jamais durable et vite contourné. Au Royaume-Uni, qui en compte plus que dans tout autre pays européen, Scotland Yard conclut encore plus nettement à leur inefficacité dans un rapport publié en 2008. Et la ville de Miami, comme bien d’autres aux Etats-Unis, procède à la désinstallation de toutes les siennes… Aucune caméra ne peut remplacer la présence humaine dans la sécurisation des lieux qui nécessitent une surveillance particulière et qui ne sauraient se multiplier à l’infini.
Inefficace et coûteuse, l’inflation de la vidéosurveillance est surtout liberticide. Non seulement l’enregistrement de l’image d’une personne sans son consentement est une atteinte à la vie privée, protégée par la Convention européenne des droits de l’Homme et par l’article 9 du Code civil, mais le projet de suivre en permanence les allées et venues de chacun n’est pas compatible avec une société de libertés. Les images enregistrées peuvent être utilisées à toutes sortes de fins illégitimes : grâce à elles, certaines entreprises surveillent leurs salariés jusque dans leur intimité et aussi les délégués syndicaux, comme certains régimes autoritaires traquent leurs opposants politiques.
Prétendre que celui qui n’a rien à se reprocher n’a rien à craindre de la vidéosurveillance, c’est faire de chacun de nous un suspect potentiel qui devra s’expliquer sur sa présence là où on l’a filmé à son insu, remplacer le principe constitutionnel de présomption d’innocence par une logique de contrôle généralisé de la population.
La Ligue des droits de l’Homme appelle les citoyens à s’opposer à cette prolifération des systèmes de surveillance invisible et à exiger que l’utilisation de ces équipements soit strictement encadrée, contrôlée et limitée aux situations dans lesquelles le maintien de l’ordre public la nécessite absolument.
Paris, le 25 mars 2009
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