Communiqué de L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, cosigné par la FIDH et l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT)
La Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), dans le cadre de l’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, expriment leur préoccupation face à la multiplication des atteintes aux libertés d’association et de réunion et des entraves à l’action des ONG de défense des droits de l’Homme.
Alors que le Maroc s’apprête à accueillir la 2e édition du Forum mondial des droits de l’Homme, une augmentation inquiétante des cas d’entraves à l’action des associations de défense des droits de l’Homme est observée dans le pays.
L’Association marocaine des droits humains (AMDH) a en effet été ces dernières semaines régulièrement victime d’entraves à l’exercice des libertés d’association et de réunion, en se voyant refuser de tenir plusieurs de ses activités publiques, à commencer par les colonies de vacances qu’elle organise annuellement et la tenue de conférences dans des salles publiques. Depuis le 12 juillet 2014, pas moins de 12 événements organisés par l’association ont ainsi été interdits ou empêchés sans notification préalable et au dernier moment, soit de manière informelle, soit pour des motifs discrétionnaires émanant des autorités marocaines, sans fondement légal. A plusieurs reprises, les locaux dans lesquels l’événement organisé par l’association devait se tenir ont été cadenassés, ou leur accès interdit, par les forces de l’ordre sans motif valable[1].
Une conférence sur le thème « Médias et démocratie » prévue à la Bibliothèque nationale à Rabat le 27 septembre 2014 a été interdite. Le Wali de la ville a justifié cette interdiction au motif que l’association n’avait pas respecté les dispositions de l’article 3 du dahir 1,58,377 relatif aux rassemblements publics, alors que l’article en question précise que les associations légalement constituées, comme l’AMDH, sont exemptées de l’obligation de déclaration préalable de réunion publique.
Par ailleurs, le 1er septembre 2014, la section marocaine d’Amnesty International s’est vu interdire la 16e édition d’un camp de jeunesse au motif que la procédure adéquate n’aurait pas été suivie. L’organisation a pourtant affirmé, et conservé les documents prouvant, que toutes les démarches prévues par la loi marocaine avaient été entreprises pour la préparation de cet événement.
De même, le 27 septembre une « Caravane de solidarité avec les Subsahariens » dénonçant les abus dont sont victimes des migrants au Maroc a été bloquée par les forces de l’ordre aux portes de Tanger. Aucune explication n’a été fournie pour justifier l’interdiction faite à cette caravane d’entrer dans la ville.
Ces entraves répétées à l’action des organisations de défense des droits de l’Homme, ont connu une recrudescence après des déclarations du ministre de l’Intérieur, qui a déclaré devant le Parlement marocain le 15 juillet dernier, que des organisations non gouvernementales étaient influencées par des agendas étrangers et par leurs actions pouvaient nuire à la réputation et à la sécurité du pays[2].
Par ailleurs, l’Observatoire s’inquiète d’actes de violence perpétrés par des inconnus à l’encontre de défenseurs. Le 24 septembre dernier, M. Hicham Mansouri, membre de l’Association marocaine pour le journalisme d’investigation (AMIJ) a été victime d’une agression grave par des inconnus, lui causant une invalidité de 25 jours. Quelques jours auparavant, les bureaux de son association avaient été pillés et le site Internet piraté
L’Observatoire appelle les autorités marocaines à garantir la liberté d’association des défenseurs des droits de l’Homme en toutes circonstances, ainsi que la sécurité des membres et locaux des ONG de défense des droits de l’Homme, conformément à l’article 22 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), et à l’article 5.b de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998.
Paris, le 7 octobre 2014