Sortie le 9 novembre 2016
Synopsis
« Il y a soixante-dix ans, les ordonnances promulguant les champs d’application de la Sécurité sociale étaient votées par le Gouvernement provisoire de la République. Un vieux rêve séculaire émanant des peuples – vivre sans l’angoisse du lendemain – voyait enfin le jour. Le principal bâtisseur de cet édifice des plus humanistes qui soit, se nommait Ambroise Croizat. Qui le connaît aujourd’hui ?
Soixante-dix ans plus tard, il est temps de raconter cette belle histoire de la sécu. D’où elle vient, comment elle a pu devenir possible, quels sont ses principes de base, qui en sont les bâtisseurs et ce qu’elle est devenue au fil des décennies. »
Entre Histoire et Présent, pédagogie et émotion, Gilles Perret rappelle que la Sécurité sociale n’est pas un dossier comptable mais un enjeu humain et politique.
Gilles Perret est un réalisateur engagé ; son précédent film paru en 2013, Des jours heureux, racontait la belle et étonnante histoire du Conseil national de la Résistance (CNR). Il dit que c’est ce film, dont il reprend les mêmes ingrédients (des images d’archives, des précisions percutantes de spécialistes et des témoignages forts, sans commentaire ni voix off), qui lui a donné le désir de consacrer un nouvel opus à l’une des mesures phares du CNR, à savoir la création de la Sécurité sociale.
A priori un tel sujet ne paraît pas très cinégénique mais c’est sans compter sur le talent de Gilles Perret et son humanisme ; il choisit donc d’incarner son sujet dans deux beaux personnages : un ancien ouvrier qui, en 1946, à l’âge de 26 ans, était secrétaire de l’Union départementale CGT et a donc siégé comme président du conseil d’administration de la caisse de son département de Haute-Savoie, et un historien issu d’un milieu populaire, passionné par la personnalité d’Ambroise Croizat auquel il doit, dit-il, d’avoir pu suivre des études supérieures. Car la Sécu, à sa création, couvrait non seulement la branche maladie mais également les retraites, les allocations familiales et les accidents et maladies du travail.
Le vieil homme personnifie avec brio, générosité, élégance et fierté l’histoire du mouvement ouvrier et sa capacité à créer de grandes choses. C’est lui qui ouvre le film et le clôt lors d’une rencontre avec les élèves, futurs cadres supérieurs de la Sécu dans la grande Ecole où ils sont en formation. Entre ces deux termes on aura découvert des archives émouvantes évoquant la vie d’Ambroise Croizat et rappelant ce qu’on lui doit, et on se sera plongé dans un récit de l’Histoire du mitan du XXe siècle telle qu’on ne la raconte pas souvent car trop subversive sans aucun doute.
C’est ce qui explique l’éviction de l’Histoire officielle d’Ambroise Croizat, un homme pourtant adulé en son temps et dont l’enterrement « à la Victor Hugo » avait mobilisé les foules émues venues rendre hommage à celui qui leur avait rendu leur dignité. On aura aussi assisté aux attaques menées contre ce système qui repose sur une mutualisation des cotisations.
A ce propos, Gilles Perret explique : « Il y a toujours eu des opposants : avant la Sécu, il y avait un système de charités, de mutuelles chrétiennes ou patronales. Passer sous la coupe de la CGT et du PC n’a pas été simple, mais sans eux, la généralisation du système pour les classes les plus pauvres n’aurait pas eu lieu. Les forces réactionnaires se sont tout de suite organisées pour résister à ce projet. La Sécu a été attaquée de l’intérieur, car l’État nomme des directeurs de plus en plus imprégnés de libéralisme, et de l’extérieur, notamment par le Mouvement pour le droit à être désaffilié de la Sécurité sociale. Ce sont des ultralibéraux, assez agressifs qui disent aux gens : “Vous auriez des salaires doubles en arrêtant de cotiser, et en prenant des petites assurances pas cher”. C’est le projet du Medef qui progresse et pour moi le loup est dans la bergerie. » Et ceci bien que ce modèle économique soit de loin le plus efficace et le plus avantageux pour tous.
Ce beau documentaire fait la lumière sur beaucoup de choses ignorées par la plupart et cachées par certains autres. Il le fait sans passéisme : si l’Histoire, une fois de plus, occupe une place importante (mais le dernier tiers du film est très contemporain), il ne s’agit pourtant pas d’un documentaire historique. En lui rappelant le passé, Gilles Perret aide le spectateur à mieux comprendre son présent et semble l’interroger sur l’avenir. Il nous rappelle ce qu’il est possible de réaliser lorsque le politique est au service de la démocratie sociale et de l’égalité. On ressort de la séance en ayant envie de se battre pour conserver ces « conquis sociaux ».
La Sociale
Documentaire, France, 2015
Durée : 1h24
Réalisation : Gilles Perret
Production et distribution : Rouge Productions
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