Communiqué LDH
Janvier 1978 – janvier 2018, la loi 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés « fête » ses 40 ans. Depuis le 23 janvier 2018, elle s’apprête à subir un toilettage qui n’est pas lié à son « âge » mais au fait que la France, comme les autres pays de l’UE, doit mettre en œuvre le Règlement général de protection des données 2016/679 (RGPD). La Ligue des droits de l’Homme (LDH) attend de cette nouvelle modification un renforcement de cet instrument, dont ses auteurs de 1978 avaient construit la pérennité.
Le préambule (article 1er) de la loi était fortement visionnaire, si l’on se remet dans le contexte historique où les pères de l’ordinateur personnel étaient tout juste nés et où l’internet n’était qu’un objet de science-fiction ! A l’heure où les libertés fondamentales sont attaquées, il faut marteler sans relâche son message : « L’informatique doit être au service de chaque citoyen. Son développement doit s’opérer dans le cadre de la coopération internationale. Elle ne doit porter atteinte ni à l’identité humaine, ni aux droits de l’Homme, ni à la vie privée, ni aux libertés individuelles ou publiques. »
La LDH entretient les plus grands doutes sur les protections qu’apportera la révision de la loi. En effet le RGPD, voté par l’UE depuis le 27 avril 2016, doit s’appliquer avant le 25 mai 2018, mais ce n’est que depuis le 23 janvier que les députés examinent en procédure d’urgence ce « Projet de loi relatif à la protection des données personnelles ».
La LDH s’étonne que les dispositions contenues dans le RGPD n’aient pas fait l’objet d’une anticipation des pouvoirs publics. En effet, le RGPD est directement applicable dans la législation française, comme dans celles des autres pays de l’UE. Pourquoi ce retard, alors que le texte apporte de meilleures protections de la vie privée ?
L’exposé du contenu du RGPD dit toute son importance. Le consentement des personnes à la collecte de leurs données personnelles devra être libre, explicite, éclairé et univoque. Le droit à l’oubli, la portabilité des données (possibilité pour l’internaute de transférer ses données d’un fournisseur de services à un autre), la responsabilisation des entreprises en termes de sécurité et de prise en compte de la vie privée, dès la conception des traitements de données, les amendes allant jusqu’à 4 % du chiffre d’affaires mondial que les entreprises coupables pourraient se voir infliger, sont quelques-unes des garanties devant permettre à tous les résidents de l’UE de mieux contrôler l’usage de leurs données personnelles.
La LDH regrette que le gouvernement ait beaucoup trop tardé pour soumettre ce projet de loi. Compte tenu de ce retard, le gouvernement se dit obligé d’utiliser la procédure d’urgence, qui ne permet pas un débat démocratique.
La LDH enfin proteste contre l’article 20 du projet de loi qui autorise à prendre par voie d’ordonnance les mesures nécessaires à la réécriture de l’ensemble de la loi Informatique & libertés, et d’utiliser l’article 23 du Règlement qui prévoit que les Etats pourront limiter la portée des obligations et des droits prévus « lorsqu’une telle limitation respecte l’essence des libertés et droits fondamentaux et qu’elle constitue une mesure nécessaire et proportionnée dans une société démocratique ». En clair, cela concerne notamment la sécurité nationale, la défense nationale, la sécurité publique, ce qui signifie que les dispositions, notamment de la loi renseignement, que la LDH, avec nombre d’autres associations a critiqué ne seront pas concernées par la nouvelle loi « informatique & libertés ».
A l’heure où un sondage, réalisé en décembre 2017 pour La Poste, montre que les Français ont une pratique intensive du numérique mais que seuls 40 % d’entre eux lui font confiance, la LDH exercera la plus grande vigilance durant l’examen du projet et lors de la publication des ordonnances. Il s’agit de l’avenir de notre vie privée et du choix de la société dans laquelle nous voulons vivre.
Paris, le 26 janvier 2018
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