Communiqué LDH
Samedi soir 19 mai 2012, une embarcation s’est renversée dans le sud de Mayotte.Elle arrivait d’Anjouan, chargée de quarante-trois personnes, dont quatre enfants. On compte cinq morts et quinze disparus. Autrement dit, la moitié des passagers a perdu la vie. La LDH considère que la responsabilité de la France est engagée, et qu’elle ne peut la rejeter sur la mer dangereuse ou sur la sécurité du territoire.
C’est, dit-on, « Un drame de plus, avant d’autres à venir ». La phrase peut paraître juste. Mais elle ne prend de sens que si l’on dit la nature du drame. Il ne s’agit pas de misère, de naufrage de clandestins voulant rejoindre la France qui ne peut, tout le monde le sait « accueillir toute la misère du monde ». En réalité, les personnes embarquées sur ce « kwassa » sont celles auxquelles un simple accès au droit a été refusé. Certains demandaient une régularisation de leur situation, d’autres que l’on fasse accueil à la demande de délivrance de leur carte nationale d’identité (CNI).
Ce ne sont pas les « clandestins » de Mayotte, ceux qui auraient tenté de « débarquer illégalement sur l’île pour y travailler et s’y faire soigner », ceux dont on dit qu’ils n’ont ni attache ni connaissance de la France que de savoir que l’on y rase gratis ! Nombre d’entre eux ont des liens profonds avec Mayotte (une île parmi d’autres d’un archipel qui s’appelle les Comores) mais ils n’arrivent pas à se faire entendre. D’abord parce que le droit à Mayotte est dérogatoire et qu’on y applique une réglementation qui n’a rien à voir avec la loi commune, ensuite, faute de personnels suffisamment qualifiés et en nombre pour traiter leur demande. Ainsi plusieurs milliers de Français de droit n’ont pas accès à la CNI et sont donc expulsables sans recours suspensif, selon les consignes expresses de l’administration et leur application par les services de police et de gendarmerie.
A raison de plus de vingt mille expulsions par an –dont la plupart dans la plus grande illégalité–, les « sans-papiers » de Mayotte ont déjà été expulsés plusieurs fois et cette politique conduit à la mort : le mur de radars ne laisse de passages que dans les zones les plus dangereuses où viennent se disloquer les barques sans que rien ne change dans la politique et le droit, loin, si loin de la France…
La LDH demande au gouvernement le rétablissement de la loi et des règles de droit sur tout le territoire de la République. Elle s’adresse à Victorin Lurel, ministre de l’Outre-mer, pour qu’il entame une approche, par les droits, de la situation mahoraise.
Paris, 22 mai 2012.