En conclusion, devant la liste des abus et les désordres provoqués par ce statut scolaire et la gravité des problèmes de fond qu’elle pose pour la République, Je vous demande au nom de la Ligue des droits de l’Homme de bien vouloir prendre deux initiatives : I) Envoyer dès la rentrée prochaine en Alsace et Moselle une mission de l’Inspection générale en vue d’une enquête approfondie sur la situation réelle engendrée dans les trois départements du fait de l’application actuelle du statut scolaire local, sur l’état et le fonctionnement de ce dispositif dans les écoles, collèges et lycées. Cette mission devrait à notre sens, procéder à des investigations étendues dans plusieurs domaines. En voici quelques-uns : 1) Faire examiner la conformité légale et réglementaire de toutes les pratiques mises en œuvre, quant au respect de la liberté de conscience et la réglementation générale de l’Éducation nationale ; entendre à cet effet toutes les parties concernées (parents d’élèves, personnels enseignants et administratifs, représentants de toutes les confessions, concordataires ou non). 2) Faire toutes les investigations nécessaires quant à la qualification, la gestion, l’emploi et les rémunérations des personnels, ecclésiastiques ou profanes, la nature exacte de leur enseignement (catéchèse ou enseignement sur les religions). Cette mission d’inspection ne saurait être refusée par les partisans de ce statut sauf à reconnaître qu’ils refusent que la clarté soit faite sur une réalité qu’ils présentent comme satisfaisante, voire exemplaire. De son côté, en refusant cette enquête, le Ministère manifesterait un esprit partisan que nous n’osons même pas envisager. II ) La mise en chantier d’un projet de loi actualisant le statut scolaire local d’Alsace et Moselle. Cette loi répondra à plusieurs nécessités : 1) Elle fera cesser l’immense confusion actuelle et remédiera à l’absence de codification de ces textes. Ainsi, ce statut scolaire deviendra pour la première fois accessible aux usagers et aux administrateurs. 2) Étant bien-entendu que le nouveau texte devra respecter pleinement la liberté de conscience de tous les jeunes et de leurs parents, musulmans compris, et être conforme à la Convention européenne des droits de l’Homme. A cet effet, il conviendra que la prétendue obligation de l’enseignement religieux soit remplacée par une option laissée au libre choix des parents, consultés à chaque rentrée. Il va de soi que, dans notre esprit, cette élaboration doit être précédée d’une information objective et contradictoire de la population et associer, outre toutes les confessions, concordataires ou non, les élus, ainsi que les représentants des parents d’élèves et des syndicats d’enseignants. Enfin, nous demandons que, d’ores et déjà, l’obligation soit faite à tous les chefs d’établissement (directeurs d’écoles, principaux de collèges et proviseurs) d’avoir à informer clairement chaque année les parents quant à leur droit à la dispense de l’enseignement religieux. Dans l’espoir que cette situation et ces propositions retiendront de votre part l’attention qu’elles nous semblent mériter, Nous vous prions de bien vouloir agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de notre haute considération. Michel TUBIANA, Président de la Ligue des droits de l’Homme Paris, le 8 août 2001