Le Président de la République vient de promulguer la loi relative à la sécurité quotidienne. Il a refusé de saisir le Conseil constitutionnel. A l’inverse du Premier ministre, du Président de l’Assemblée nationale et du Sénat, le Président de la République a justifié son refus. La LDH ne partage pas les arguments du Président de la République ou le silence de celui-ci quant à la régularité de la procédure parlementaire qui a conduit à l’adoption de ces dispositions. Elle constate, dès lors, que l’ensemble des responsables politiques de ce pays se sont entendus pour faire échec au contrôle du Conseil constitutionnel. Cela rend d’autant plus urgente la réforme proposée par François Mitterrand et rejetée par le Sénat qui permettait aux citoyens de saisir cette haute juridiction. La LDH exercera un contrôle vigilant de l’application des dispositions qu’elle conteste et fera tout, bien entendu, lors de leur échéance du 31 décembre 2003 pour qu’elles ne soient pas renouvelées. Paris, le 15 novembre 2001 Lettre de Jacques CHIRAC, Président de la République Paris, le 15 novembre 2001 Monsieur le Président, Par lettre du 26 octobre 2001, vous m’avez fait part de votre souhait que je saisisse le Conseil constitutionnel de la loi relative à la sécurité quotidienne récemment adoptée par le Parlement. Votée à une très large majorité par l’Assemblée nationale et par le Sénat, cette loi n’a fait l’objet d’aucune contestation devant le Conseil constitutionnel par les autorités parlementaires habilitées à le saisir, ne en ce qui concerne la procédure suivie pour son adoption, ni en ce qui concerne le contenu des dispositions arrêtées par la représentation nationale. Vous connaissez l’engagement constant qui est le mien d’œuvrer au nom de la France en faveur des droits de l’Homme partout dans le monde. Chargé de veiller au respect de notre Constitution par l’article 5 de celle-ci, j’ai procédé à un examen très attentif de votre demande. Les dispositions destinées à renforcer l’efficacité de la lutte contre le terrorisme que cette loi comporte me paraissent proportionnées à la gravité des risques vitaux dont les crimes de masse perpétrés aux États-Unis le 11 septembre dernier ont révélé l’ampleur. Ces mesures limitées dans le temps comportent des garanties de procédure et prévoient un contrôle de l’autorité judiciaire qui permettent d’assurer le respect des règles fondamentales posées par la Constitution pour la protection des libertés individuelles. Chacun en France est bien conscient que la sécurité fait partie des droits de l’Homme et qu’elle est la première des libertés. Chacun sait aussi que l’insécurité frappe de manière privilégiée nos compatriotes les plus vulnérables et qu’elle constitue par conséquent la première des inégalités. Au regard de l’ensemble de ces éléments, j’estime qu’il est important que les dispositions nouvelles adoptées par le Parlement, qui sont conformes à notre tradition républicaine, entrent rapidement en vigueur. C’est pourquoi j’ai décidé de promulguer aujourd’hui même cette loi. Je vous prie de croire, Monsieur le Président, en l’expression de mes sentiments les meilleurs. Jacques CHIRAC
A Michel TUBIANA, Président de la Ligue des droits de l’Homme