Le gouvernement se propose de limiter, par décret, à quatre mois la durée de la domiciliation associative pour les demandeurs d’asile. Pourtant, cette possibilité est souvent la seule solution pour justifier de l’adresse indispensable à leurs démarches dès lors que le dispositif d’accueil ne permet d’héberger qu’environ 10% d’entre eux. Aujourd’hui, la majorité survit dans des hébergements de très courte durée ou à la rue.
Les demandeurs qui n’auraient pas trouvé une résidence réelle en quatre mois perdraient la preuve de leur droit au séjour ainsi que les allocations de survie et la couverture maladie qu’il conditionne. Protégés de tout éloignement par la convention de Genève jusqu’à ce qu’il soit statué sur leur demande, ils seraient de nouveaux « sans-papiers en situation régulière », avec tous les risques que représente la précarité juridique cumulée à une précarité économique et sociale.
En outre, pour qu’une association soit à l’avenir autorisée à domicilier les demandeurs d’asile , elle devrait être « agréée » par la préfecture ; les associations courraient donc le risque, comme la réforme récente de l’asile l’impose déjà à l’OFPRA et à la Commission des recours, de devoir, sauf à perdre leur agrément, collaborer à la politique du gouvernement, notamment en matière d’éloignement des déboutés, alors même que cette politique irait à l’encontre de la mission d’aide et de solidarité qu’elles se sont donnée.
Ces nouvelles règles s’inscrivent dans le droit fil de la réforme de la loi sur l’asile votée le 10 décembre 2003. Tenant pour acquis que la plupart des demandeurs d’asile sont des « faux réfugiés » et qu’il est nécessaire de réduire les délais de procédure, celle-ci limite les possibilités de solliciter l’asile en France, et permet, par l’utilisation de la notion de « demande manifestement infondée », que toute la procédure soit entièrement traitée sur dossier. Et maintenant, elle pourrait obliger les demandeurs à séjourner sur le territoire dans les mêmes conditions qu’un étranger en situation irrégulière.
On peut craindre qu’à terme, la politique française de l’asile s’inspire des systèmes en vigueur chez certains de ses partenaires européens, qui subordonnent le traitement d’une demande d’asile à l’assignation à résidence des demandeurs dans un centre ad hoc.
La CFDA rappelle que dans sa plateforme Dix conditions minimales pour un réel droit d’asile elle défend les principes suivants : à chaque étape de la procédure d’asile, le demandeur doit pouvoir être entendu et disposer d’un conseil et d’un interprète ; une instruction correcte des requêtes suppose la mise en place de moyens adéquats, à tous les niveaux. En matière d’hébergement, les demandeurs d’asile doivent avoir la liberté de choisir entre solution individuelle et solution collective en Centre d’Accueil pour Demandeurs d’Asile (CADA). Pour que ce choix soit réel, l’offre en places collectives doit être suffisante et le soutien apporté équivalent dans chacune de ces formules.
Multiplier les exceptions et les procédures accélérées, poser des obstacles au dépôt des demandes, et organiser l’irrégularité des demandeurs d’asile peuvent certes constituer des solutions pour faire baisser le volume de la demande d’asile en France. Mais au risque évident du renoncement, par notre pays, du devoir de protection qui demeure cependant le sien.
10 mars 2004
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