Un travail de réflexion sur le thème des fins de vie a été mené conjointement avec les sections de la LDH au cours du dernier trimestre de l’année 2001. Vingt-sept sections ont envoyé au siège un relevé de leurs réflexions sur les fins de vie aujourd’hui. Trois sections n’ont pas souhaité prendre position. Trois autres sections se sont prononcées clairement contre la dépénalisation, a fortiori la légalisation, de l’euthanasie. Les raisons invoquées sont essentiellement la crainte des abus et des dérives, le refus d’une approche individualiste remettant en cause une approche sociétale et éthique commune avec des conséquences pour le futur difficiles à appréhender, l’influence du facteur économique et un danger de mort pour les vieillards (l’euthanasie est beaucoup moins onéreuse que le nécessaire développement des soins palliatifs et la prise en charge des personnes dépendantes). Elles mettent l’accent sur la nécessaire généralisation des unités de soins palliatifs et sur le suivi approprié de leur activité. Vingt et une sections ont donc travaillé sur l’hypothèse d’une législation concernant la dépénalisation ou la légalisation de l’euthanasie active, du suicide assisté et on peut noter les réflexions suivantes : – L’idée de légaliser est rejetée, celle de dépénaliser au cas par cas est retenue. L’euthanasie passive doit être acceptée, la notion de « traitements futiles » s’imposant à celle de « non-assistance à personne en danger ». De même est acceptée l’euthanasie involontaire lors de soins palliatifs. Aux yeux des médecins, le suicide médicalement assisté est inacceptable, tandis que le suicide assisté est possible. Enfin, pour beaucoup il y a réticence à médicaliser la mort : est-ce au médecin de distinguer les pratiques déraisonnables de maintien en vie (difficulté de distinguer la limite entre acharnement et persévérance thérapeutiques) et d’acquiescer au fait que le malade n’est plus rien, n’a plus de raisons de vivre ? – Quatre sections ont mis en avant l’inefficacité de la répression, la lutte contre les euthanasies clandestines et la nécessité de mettre fin à l’inégalité devant la mort comme l’arbitraire judiciaire. – Globalement, les sections considèrent la différence entre l’obligation de vie et le droit à la vie, affirment la nécessité de respecter l’autonomie décisionnelle de chacun/e comme la clause de conscience des soignants, veulent voir reconnaître par le droit la notion de compassion pour distinguer euthanasie et crime, afin que ne soit pas poursuivi celui qui aide à mourir. – Les critères à retenir pour une euthanasie sont une demande réitérée, libre et consciente, expresse, voire peut être celle d’une seule personne, la décision doit être collective. Par ailleurs, trois sections refusent l’intervention de la famille, de l’entourage tandis que trois autres considèrent que ceux-ci doivent être associés à la décision. – Quinze sections ont insisté sur l’obligation préalable des soins palliatifs et de l’accompagnement, souhaitant le développement de ceux-ci avec leur généralisation et une réelle formation des médecins et des soignants ; certaines envisagent leur extension au domicile des patients. Il ne leur semble pas y avoir de contradiction entre les soins palliatifs et l’euthanasie. – Affirmant l’auto détermination des personnes, plusieurs font référence, comme l’association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD), à la possibilité d’un testament de vie et de l’existence d’un mandataire apte à le faire valoir si la personne n’en est plus capable elle-même, ce testament étant toujours révocable. Sont rappelés les sondages sur lesquels s’appuie l’ADMD et qui indiquent une évolution des mentalités sur l’aide à mourir. Toutefois les ligueurs font remarquer que ces sondages s’adressent à des bien-portants et que la réponse est biaisée, chacun/e sachant que l’euthanasie est interdite. – Sont rappelés les trois critères dégagés par la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFASP) : symptômes physiques insupportables en dépit des soins palliatifs, demande claire (« faites-moi mourir » et non pas « j’ai envie de mourir »), demande persistante et non ponctuelle. Sur 629 dossiers de demandes, seuls 5 cas répondaient à ces trois critères. – Une section signale le risque de voir se mettre en place des équipes spécialisées dans la mort donnée ; quatre insistent sur les risques de dérives liées aux pressions économiques, sociales, voire familiales. – Enfin quatre sections pointent des difficultés, voire des problèmes insolubles, en citant : quelle position adopter en cas de souffrances morales si on acquiesce à la demande en cas de souffrances physiques insupportables malgré les soins palliatifs ? De même, que faire face à des patients lourdement dépressifs alors qu’on exige une demande libre et consciente ? Quelle attitude adopter pour les mineurs, les handicapés mentaux, les vieillards séniles ? Que faire face à des nouveau-nés ou des adultes polyhandicapés, à ceux qui sont maintenus artificiellement en vie, à la demande de personnes âgées fatiguées de vivre ou se sentant inutiles ?