Communiqué commun de plusieurs organisations, dont la LDH
Le président français Emmanuel Macron, reçoit après demain à Paris Mohammed ben Zayed Al Nahyane, prince héritier d’Abou Dhabi et de facto dirigeant des Émirats arabes unis. Alors que le Yémen vit une crise humanitaire sans précédent, les belligérants n’ont toujours pas acté une cessation des hostilités qui touchent la population civile et détruisent les infrastructures du pays.
En tant qu’homme fort de son pays, Mohamed Ben Zayed porte une lourde responsabilité dans la poursuite de cette guerre. Les Emirats arabes unis sont en effet, aux côtés de l’Arabie saoudite, un acteur majeur de la coalition qui a engagé une guerre de grande envergure depuis maintenant plus de trois ans. De nombreux rapports et enquêtes ont apporté des éléments factuels attestant que les forces armées soutenues par les Emirats arabes unis se sont rendues coupables de crimes de guerre et de violations du droit international humanitaire.
Les Emirats arabes unis sont spécifiquement en première ligne dans le cadre de la bataille actuelle dans le gouvernorat d’al-Hodeïda : en l’espace de quatre mois, près d’un demi-million de Yéménites ont été forcés de fuir les combats dans cette région. Si la nouvelle offensive en cours depuis une quinzaine de jours, – qui a été marquée par la violence et la multiplicité des bombardements et des combats – semblent aujourd’hui bénéficier d’une accalmie, il est urgent de parvenir à une cessation totale des hostilités sur tout le territoire et d’entamer des discussions de paix, seule solution d’une sortie de crise.
Certaines zones de la région sont aujourd’hui extrêmement difficiles d’accès et la route principale entre al-Hodeïda et la capitale Sanaa est coupée. Par ailleurs, face à la nouvelle flambée des prix des biens de première nécessité (+25% en quelques semaines et +230% depuis le début du conflit pour le panier moyen), une escalade des violences dans cette ville portuaire, par où passe 70% de l’aide humanitaire du pays, pourrait aggraver les phénomènes d’inflation et le marasme économique et plonger près de 14 millions de personnes, dépendantes d’une aide alimentaire d’urgence, dans une situation de famine. La communauté internationale n’a plus le droit de détourner le regard.
Face à cela, les organisations signataires demandent au président de la République française de peser de tout son poids auprès de son partenaire émirati pour stopper l’offensive d’al-Hodeïda, notamment en soutenant la délégation aux Nations unies de la gestion et supervision du port. La France doit réitérer la nécessité de mettre un terme aux violences contre les civils et d’assurer leur protection sur l’ensemble du pays. La France doit continuer d’exiger un accès humanitaire sans entrave, notamment en s’assurant que les travailleurs et biens humanitaires puissent se rendre jusqu’aux personnes dans le besoin, peu importe où elles se trouvent.
A l’échelle française, les organisations signataires réitèrent leur demande au président de la République de suspendre les ventes et transferts d’armements et d’équipements militaires aux parties en conflit au Yémen, dont les Émirats arabes unis, et ce jusqu’à la fin des combats.
Dans ce cadre, les autorités françaises doivent également appuyer la mise en place d’une commission d’enquête parlementaire sur la livraison d’armes françaises aux belligérants étant donné les risques élevés que ces ventes soient en contradiction avec les engagements de la France à travers le Traité sur le Commerce des Armes et la position commune européenne sur les exportations d’armes.
Le Yémen a un besoin urgent de retrouver la voie de la paix afin d’éviter l’aggravation d’un drame qui représente la plus grave crise humanitaire au monde et qui menace de déstabiliser toute la région. Le président Emmanuel Macron doit porter une parole publique claire et sans ambiguïté donnant une priorité nette à la protection des populations yéménites.
Paris, le 19 novembre 2018
Organisations signataires : Alliance internationale pour la défense des droits et libertés (AIDL), Observatoire des armements (OA), Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH), Ligue des droits de l’Homme (LDH), Action contre la faim (ACF), Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (Acat), Première urgence internationale (PUI), Care France