Communiqué de l’Observatoire de la liberté de création
L’Observatoire de la liberté de création s’inquiète des pressions, menaces de mort et injures racistes et homophobes subies par le chanteur de 19 ans Bilal Hassani qui représentera la France au concours de l’Eurovision. Sanctionner le déchaînement de la haine discriminatoire sur les réseaux sociaux relève de la responsabilité des pouvoirs publics et en particulier du Parquet. L’Observatoire félicite les associations Urgence Homophobie et Stop Homophobie qui sont aux côtés du chanteur pour le soutenir dans le dépôt de plaintes.
Ces messages de haine ont un objectif : refuser que ce chanteur représente la France. Qu’ils émanent de personnes privées qui, par leur harcèlement, cherchent à la fois à influencer le jury qui a choisi le candidat, et à décourager celui-ci pour qu’il se retire de la compétition, comme cela est arrivé à la jeune Mennel dans le radio-crochet de TF1, ne change rien au fait qu’il s’agit de censurer un chanteur, non pour ce qu’il chante, mais pour ce qu’il est.
Les chanteurs d’origine musulmane font l’objet d’un harcèlement particulier. On se souvient de la campagne de haine contre Médine qui devait chanter au Bataclan et a finalement dû faire son concert au Zénith. Ce harcèlement se passe des tribunaux, et les évite. Car rien ne peut être reproché légalement à ces artistes.
Bilal Hassani n’est pas seulement d’origine marocaine. Il est aussi français, gay et queer. Et cela suffit à déchaîner la haine de certains contre lui. De certains seulement, puisqu’il a été choisi en partie par le public français, n’en déplaise à monsieur le sénateur LR Henry Leroy.
Celui-ci a écrit une lettre sur papier à en-tête du Sénat pour demander au jury de l’Eurovision que le chanteur soit écarté de la compétition. Ce sénateur avait, dans les colonnes de Nice Matin (12 novembre 2018), comparé les partisans d’une extension de l’accès à la PMA aux femmes seules et aux couples lesbiens au Dr Mengele et à l’eugénisme nazi.
Quand il reproche au jeune chanteur une vidéo dans laquelle il se moquerait des attentats de Paris, on peut donc douter de sa sincérité. Cette vidéo potache de Bilal et ses amis reprenant une vidéo virale d’un humoriste ivoirien célébrant la victoire de la coupe du monde ne paraît pas être la véritable raison de l’intervention brutale du sénateur dans un débat qui ne le concerne en rien.
Le jury de l’Eurovision est composé d’artistes, de professionnels et du public français. Sa décision ne peut être remise en cause par un élu de la République sous de faux prétextes. La chanson choisie, qui n’est pas en cause, prône l’acceptation de la différence. Le sénateur ferait bien de l’écouter.
L’Observatoire de la liberté de création rappelle que la censure des œuvres motivée par la haine raciste ou homophobe n’est en aucun cas acceptable dans une société démocratique.
Paris, le 15 février 2019