Communiqué de France assos santé et du collectif Alerte, dont la LDH est membre
France assos santé et le collectif Alerte font état de leurs préoccupations concernant la dégradation de la santé des personnes en situation de précarité et la multiplication des zones de non-droit. À chaque étape de la crise sanitaire du Covid-19, leurs conditions de vie, déjà difficiles, se détériorent encore davantage avec des conséquences souvent dramatiques pour leur santé. À l’aube du déconfinement, et parce que les manquements de l’Etat se sont accumulés, nous appelons à des mesures d’urgence pour que certaines populations ne soient pas reléguées hors du système de santé.
Des foyers de contamination perdurent et sont susceptibles d’entretenir la pandémie, a fortiori après le déconfinement !
Sans surprise et de façon intolérable, la crise sanitaire et économique a renforcé les inégalités sociales de santé et en a produit de nouvelles qu’il faut anticiper.
Celles et ceux qui vivent sans ressources, sans logement ou mal-logés, sans papiers, exposés du fait de leurs consommations, sans accès aux besoins essentiels et aux droits fondamentaux, ceux qui devraient attendre de notre société protection et solidarité voient leurs conditions de vie se dégrader encore davantage. Les associations constatent de multiples freins dans l’accès ou le renoncement aux soins et une aggravation de l’état de santé pour nombre d’entre eux : qu’il s’agisse de pertes de chance, d’augmentation du nombre de décès – notamment dans la rue -, de malnutrition.
Une situation alarmante, souvent liée à des défaillances du service public : l’accès aux droits est difficile faute de continuité des services publics en présentiel, de capacité de ces populations à faire des démarches, notamment numériques, multipliant les points de rupture dans les parcours de santé.
Une double peine pour des personnes dont les effets du confinement sont déjà décuplés par des conditions de vie pathogènes.
Alors que les remontées de terrain s’accumulent et face au manque criant de données objectives, France assos santé et le collectif Alerte font part de leurs plus vives inquiétudes quant à la dégradation de l’accès aux soins et à la santé des plus précaires ! Tandis que le déconfinement s’organise, nous appelons les pouvoirs publics à agir de toute urgence :
• En garantissant (enfin) l’accès aux droits pour les personnes en situation de vulnérabilité sociale
L’accès aux droits et à la santé doit être simplifié et amélioré, quel que soit le statut administratif des personnes, notamment en maintenant les facilités mises en place pendant la crise du Covid-19 (demandes d’asile, aide médicale d’Etat, Complémentaire Santé Solidaire, Puma etc..), et en accélérant le traitement des dossiers. Il est également indispensable de revenir sur les mesures prises fin 2019, visant à restreindre l’accès à l’AME et l’accès à la Puma des demandeurs d’asile. Elles ne sont pas compatibles avec les impératifs de santé publique, soulignés aujourd’hui par la crise sanitaire.
Les personnes doivent pouvoir bénéficier d’un plan global de soutien financier et d’un recours facilité aux équipes de soins et de suivi.
Enfin, une plateforme médico-sociale doit être mise en place afin de leur proposer un dépistage, les informer sur leurs droits, les aider dans leurs démarches, centraliser les dossiers. La médiation en santé doit être développée pour y contribuer.
• En instaurant une stratégie globale et massive de dépistage en direction des personnes en situation de précarité et vulnérabilité, et pas seulement auprès de celles qui ont été mises à l’abri ou hébergées en centres collectifs, et en mettant à leur disposition des masques gratuitement
• En reconnaissant le rôle des associations qui pallient les manquements de l’Etat
La reconnaissance du rôle majeur des associations dans la gestion de la crise auprès de ces publics vulnérables impose la consultation systématique de celles-ci lors des prises de décision. Il faut faciliter et soutenir leurs actions, en accordant les financements nécessaires afin qu’elles puissent accompagner, faire le lien, « aller vers », assurer une information adaptée, indispensable à un déconfinement progressif. Pour les collectivités territoriales et l’État, il est urgent de capitaliser les expériences associatives afin de construire un plan de prévention en amont de toute crise (construire et assurer la mise en œuvre des réponses aux besoins fondamentaux).
• En mettant un terme à toutes les formes de discriminations liées à la situation de crise
La prise en charge de la santé des individus sur notre sol en ces temps de pandémie doit éthiquement être égalitaire, non discriminante, retrouvant les principes de notre humanité première.
Paris, le 5 mai 2020