En décembre 2015, dix-huit jeunes du 12e arrondissement de Paris déposaient pour la première fois en France une plainte collective contre les agissements et violences exercés à leur encontre par onze policiers d’un groupe de sécurisation de quartier se faisant appeler « Les Tigres ».
Le documentaire de Marc Ball retrace le combat de ces jeunes et de leur soutien, éducateurs spécialisés, avocats, militants de plusieurs organisations, dont la section de Ligue des droits de l’Homme (LDH) Paris 12, organisées en collectif [1]. Cette mobilisation a permis de documenter et comprendre la situation de discrimination vécue, dans l’arrondissement, par les jeunes issus de l’immigration.
La révélation des violences subies par les jeunes plaignants a été un choc car elle a mis en évidence la détérioration des pratiques de maintien de l’ordre à l’égard de ces habitant-e-s, dont certains n’avaient pas plus de 13 ans : racisme, humiliations, agressions verbales, actes violents, les agissements de certains policiers attestent de graves dysfonctionnements dans la chaîne de commandement et dans la perception que ces fonctionnaires de police se font de la déontologie de leur métier. Recueillir le témoignage des victimes était difficile car ceux-ci se méfient de l’instrumentalisation qui peut être faite de leur souffrance. Le réalisateur a su gagner leur confiance de sorte que son enquête de terrain rend remarquablement compte des raisons qui ont poussé les dix-huit plaignants à briser un lourd silence.
Presque cinq ans ont passé depuis le dépôt de la plainte. En avril 2018, trois des policiers mis en cause ont été condamnés, en première instance, à des peines de prison avec sursis. Ils ont fait appel. On doit à la ténacité des avocats des plaignants d’avoir poursuivi le combat juridique par le dépôt d’une nouvelle plainte, cette fois au civil, contre l’Etat sur la base des pratiques discriminatoires documentées. Cette plainte a donné l’occasion, le 12 mai dernier, à Jacques Toubon, Défenseur des droits, de dénoncer des contrôles et des violences policières discriminatoires systémiques. Dans une interview à Mediapart, Me Slim Ben Achour, avocat des plaignants, a souligné le caractère historique d’une telle décision car elle reconnaît « un système discriminatoire, et cela au sein de la police ».
Il est très rare que les victimes de violences policières parviennent à obtenir reconnaissance et réparation des torts causés. D’où l’impérieuse nécessité de soutenir ces témoignages et ce documentaire qui les porte sur le devant de la scène. Ce qui rejoint la mobilisation de la LDH et ses revendications contre l’impunité des violences policières.
Thématiques : violences policières, justice, démocratie
[1] LDH Paris 12e, Commune libre d’Aligre, Attac 12e, association MCDS, club de prévention Soleil, Amnesty International 12e, RESF-12e, centre social Relais 59, des habitant-e-s du 12e.
Police, illégitime violence
Réalisation : Marc Ball