La LDH était représentée par la SCP Spinosi et Sureau
Etait ici en en cause le recours au délit de recel d’apologie de terrorisme pour sanctionner la consultation habituelle de sites terroristes. La LDH est intervenue au soutien d’une QPC Tendant à faire constater que les dispositions combinées des articles 321-1et 421-2-5 du Code pénal, telles qu’interprétées par la jurisprudence de la Cour de cassation, en ce qu’elles incriminent, sous la qualification de recel d’apologie du terrorisme, la consultation de sites internet faisant l’apologie du terrorisme, ou la possession d’un support informatique ou numérique sur lequel serait téléchargé le produit d’une telle consultation, portent atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit et, en particulier, d’une part, au principe de la liberté d’opinion et de communication garanti par l’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et, d’autre part, aux principes de légalité, de nécessité et de proportionnalité des délits et des peines, garantis par les articles 5 et 8 de la Déclaration.
Par une décision en date du 19 juin 2020, (n° 2020-845 QPC) le Conseil constitutionnel a réduit à néant ce délit, en confirmant fermement la logique de ses deux décisions de 2017 sur la consultation habituelle de sites terroristes.
Le Conseil constitutionnel a ainsi notamment pu relever qu’au regard de l’exigence de nécessité de l’atteinte portée à la liberté d’expression et de communication, les autorités administrative et judiciaire disposent, indépendamment du délit contesté, de nombreuses prérogatives, non seulement pour lutter contre la diffusion publique d’apologies d’actes de terrorisme et réprimer leurs auteurs, mais aussi pour surveiller une personne consultant ou collectant ces messages et pour l’interpeller et la sanctionner lorsque cette consultation ou cette collection s’accompagnent d’un comportement révélant une intention terroriste, avant même que ce projet soit entré dans sa phase d’exécution.
En second lieu, s’agissant des exigences d’adaptation et de proportionnalité requises en matière d’atteinte à la liberté d’expression et de communication, d’une part, si l’apologie publique d’actes de terrorisme favorise la large diffusion d’idées et de propos dangereux, la détention des fichiers ou documents apologétiques n’y participe qu’à la condition de donner lieu ensuite à une nouvelle diffusion publique.
D’autre part, l’incrimination de recel d’apologie d’actes de terrorisme n’exige pas que l’auteur du recel ait la volonté de commettre des actes terroristes ou d’en faire l’apologie. Si, conformément à l’interprétation qu’en a retenue la Cour de cassation, la poursuite de cette infraction suppose d’établir l’adhésion du receleur à l’idéologie exprimée dans les fichiers ou documents apologétiques, ni cette adhésion ni la détention matérielle desdits fichiers ou documents ne sont susceptibles d’établir, à elles seules, l’existence d’une volonté de commettre des actes terroristes ou d’en faire l’apologie.
Le délit de recel d’apologie d’actes de terrorisme réprime donc d’une peine qui peut s’élever, selon les cas, à cinq, sept ou dix ans d’emprisonnement le seul fait de détenir des fichiers ou des documents faisant l’apologie d’actes de terrorisme sans que soit retenue l’intention terroriste ou apologétique du receleur comme élément constitutif de l’infraction.
Le Conseil constitutionnel en déduit qu’il résulte de tout ce qui précède que le délit de recel d’apologie d’actes de terrorisme porte à la liberté d’expression et de communication une atteinte qui n’est pas nécessaire, adaptée et proportionnée. Les mots « ou de faire publiquement l’apologie de ces actes » figurant au premier alinéa de l’article 421-2-5 du code pénal ne sauraient donc, sans méconnaître cette liberté, être interprétés comme réprimant un tel délit.