La LDH soutient le film « Paris Stalingrad » de Hind Meddeb et Thim Naccache

Sortie en salle le 26 mai 2021

Stalingrad, du nom de la station de métro, près de laquelle se sont longtemps regroupés, dans des campements de fortune sur les rives du canal Saint-Martin, des hommes, des femmes, de jeunes mineurs, venus du Soudan, d’Ethiopie, d’Erythrée, de Guinée, du Nigéria, d’Afghanistan, d’Iran, du Pakistan… Après de dangereux périples, longs parfois de plusieurs années, ils/elles espéraient trouver la paix, un accueil digne de ce pays « des droits de l’Homme » qui les a tant fait rêver, de Paris « ville lumière », mais découvrent la brutalité des rafles policières, des destructions de leurs campements et des soi-disant mises à l’abri. La plupart des mineurs ont d’énormes difficultés à faire valoir leurs droits pour une prise en charge pourtant obligatoire.

Dès l’été 2016, Hind Meddeb et Thim Naccache se rendent régulièrement à Stalingrad et au jardin d’Eole sur les campements de réfugiés. Hind Meddeb parle l’arabe, ce qui leur permet d’avoir de vrais échanges avec celles et ceux qu’ils rencontrent. Ils leur expliquent bientôt leur désir de faire ce film, car, se demande la réalisatrice « Que faire, quand on devient le témoin d’une politique ouvertement hostile aux étrangers ? … Filmer, pour garder une trace, pour montrer ce que ma ville inflige aux nouveaux arrivants. ». Dès lors, Thim Naccache et elle se lancent dans le tournage de Paris Stalingrad.

Au cours de ce même été, elle rencontre Souleymane, 18 ans, refugié du Darfour qu’il a quitté après que la guerre ait éclaté et tué son père et son frère aîné. Souleymane est sur les routes depuis 5 ans : torturé au Soudan, esclave dans des mines d’or au Tchad et au Niger, enfermé dans les prisons libyennes, sauvé en Méditerranée lors de sa traversée… Son périple ressemble à celui de beaucoup d’autres…

Souleymane est poète et sa force créatrice lui permet de résister. « Nous sommes les exilés/Silencieux avec des milliers d’histoires dans notre cœur… N’aie pas peur de la mort, la vie viendra à toi/Pour avancer, je prendrai le bateau de l’impossible/Si le destin est contre toi, réponds avec le sourire/Montre-lui que l’avenir est différent pour chacun/Ainsi va la vie, nous sommes les exilés. »

Après une petite vingtaine de minutes, pendant lesquelles Hind Meddeb et son co-réalisateur filment la vie dans les campements, les files d’attente pour la distribution de nourriture et devant les locaux de France Terre d’Asile, une intervention policière, les pelleteuses qui détruisent le peu que possédaient les réfugiés, Souleymane devient une sorte de fil conducteur. En le suivant, les réalisateurs empruntent le chemin quotidien de ses nombreux frères d’exil, rencontrent ses amis, des habitants solidaires, dont deux femmes remarquables, l’une d’elles déployant une énergie folle pour tenter de mettre à l’abri de jeunes mineurs. Ils accompagnent le réfugié-poète jusqu’à la fin, positive, de son parcours.

En regard des scènes de cinéma direct qui enregistrent les interventions brutales de la police, l’incompréhension souvent désespérée des exilés et parfois leur révolte, les déambulations de Souleymane, les moments chaleureux qu’il passe avec ses amis, ses poèmes d’une grande force et finesse, sont des respirations essentielles, des instants privilégiés où éclatent le courage de ces réfugiés, leur lucidité, leur incroyable force vitale. Imaginez : alors qu’ils attendent qu’un bus les conduise dans un centre d’accueil, un ami de Souleymane se met à déclamer des vers d’Al Saddiq, poète soudanais…
D’une voix douce, Hind Meddeb intervient parfois, pour donner des informations, structurer le récit. Et une magnifique chanson de Bachar Mar-Khalifé accompagne le générique de fin.

Si ce très beau et très fort documentaire dénonce la violence que vivent les réfugiés, il est surtout un superbe hommage à leur énergie, leur endurance, à « leur vie sans répit… où il faut constamment être prêt à tout recommencer », à leurs rêves et à la poésie.

Mots-clés : Droits des étrangers ; Jeunes mineurs ; Discriminations ; Immigration ; Racisme.

Paris Stalingrad
France
Réalisation : Hind Meddeb et Thim Naccache
Production : Les Films du Sillage et Echo Films, 2019
Distribution : La Vingt-Cinquième Heure
Durée : 86′

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