Communiqué du Collectif des associations unies, dont la LDH est membre
Depuis la fin de la trêve hivernale des expulsions le 1er juin, les remontées de terrain issues des associations du Collectif des associations unies témoignent d’une multiplication des expulsions d’habitats informels et des risques d’expulsions locatives sans solutions adaptées et pérennes sur les territoires. Ces expulsions interviennent malgré les diverses mesures prises par le gouvernement pour limiter leur impact : maintien des capacités du parc d’hébergement d’urgence ouvertes pendant la crise sanitaire et l’hiver (43 000 places) a minima jusqu’à mars 2022, abondement des Fonds de Solidarité Logement et du Fonds d’indemnisation des bailleurs, instruction aux préfets visant à ne pas expulser les ménages locataires sans solution d’hébergement ou de relogement.
Dans un contexte de fragilités sociales et économiques importantes, et à une période où les possibilités de faire valoir les demandes d’aides ou de recours ont été réduites du fait des restrictions sanitaires, impactant de fait les possibilités d’accès et de maintien dans le logement, 30 000 ménages locataires et 20 000 habitants de lieux de vie informels risquent potentiellement de perdre leur logement ou leur abri dans les semaines et mois à venir.
Le Collectif s’inquiète en particulier du fait que les instructions ministérielles ne se prononcent pas sur le sort des personnes qui, faute d’alternative, vivent aujourd’hui en bidonville et squat dans la plus grande précarité. Les expulsions de lieux de vie informels se sont accélérées, au moins 103 depuis le 1er juin, sans compter toutes celles qui l’ont été pendant les mois précédant, malgré la trêve. Un grand nombre de ces lieux de vie fait l’objet d’un accompagnement associatif, souvent financé par l’Etat, de sorte que ces expulsions à répétition conduisent à briser le parcours de soins, d’insertion vers le logement et l’emploi des personnes, et bouleversent la scolarisation des enfants. Dans le cadre d’une campagne vaccinale où les personnes sans domicile sont prioritaires, la reprise des expulsions est contre-productive et ne permet pas un accompagnement serein vers la vaccination contre le Covid-19 ou le suivi des personnes entre deux injections.
Des pressions et intimidations policières ont également été recensées, conduisant les habitants à quitter les lieux avant l’expulsion. Ces pratiques inacceptables bafouent les droits fondamentaux et ne permettent pas aux personnes les plus vulnérables d’être orientées vers des solutions d’hébergement ou de logement pour construire un projet de vie pérenne.
D’autre part, la multiplication des procédures d’expulsions locatives en cours et les difficultés rencontrées pour proposer un relogement, ou à minima une solution d’hébergement adaptée aux ménages concernés le temps de trouver une réponse plus pérenne, inquiètent les associations. De fait, le parc d’hébergement d’urgence est déjà sollicité au maximum de ses capacités, et la sortie durable des personnes hébergées vers le logement reste très limitée dans de nombreux territoires. Ces tensions rendent encore plus difficile la recherche de réponses à apporter aux situations d’urgence provoquées par les expulsions de locataires et d’habitants de lieux de vie informels.
Dans ce contexte et afin d’éviter le drame social que constituerait la mise à la rue de milliers de ménages cet été ou dans les mois à venir, le CAU demande aux pouvoirs publics de réaffirmer et d’appliquer strictement et sur l’ensemble des territoires les instructions ministérielles relatives aux expulsions locatives, et d’instaurer un moratoire des expulsions des lieux de vie informels sans solutions jusqu’au 31 octobre 2021. Dans les cas où l’expulsion s’avèrerait inévitable, nous demandons à ce que des solutions concertées et pérennes soient proposées à toutes les personnes, et ce, quel que soit leur statut administratif ou leur vulnérabilité. Il est également nécessaire de renforcer les moyens humains et financiers alloués à l’accès et au maintien des personnes dans le logement.
Le CAU restera vigilant tout au long des mois à venir, et continuera à alerter les services de l’Etat et l’opinion publique autant que nécessaire.
Paris, le 7 juillet 2021