Communiqué commun concernant les arrêtés municipaux antiprécaires
Si aujourd’hui la politique communale conduite dans certains points du territoire tend à écarter les personnes sans domicile – pratiquant ou non la mendicité – des quartiers centraux les plus fréquentés, cette volonté est renforcée à l’approche de la période estivale, comme à celle de forts afflux touristiques, afin de préserver la tranquillité des touristes, des commerçants et l’image d’une ville.
En effet, de nombreux maires usent de leurs pouvoirs de police pour prendre des arrêtés qui ne sanctionnent plus seulement le trouble à l’ordre public, mais les comportements que peuvent adopter les personnes en situation de précarité sociale et économique dans l’espace public : l’occupation prolongée du domaine public, la sollicitation des passants, la station assise ou allongée, la consommation d’alcool, la présence de chiens, pour ne citer que les plus courants.
Malgré la multiplication de recours juridiques ces dernières années pour faire annuler ces mesures, et les victoires judiciaires pour condamner les villes en question, le phénomène ne faiblit pas.
Ces arrêtés sont le fruit de politiques fondées sur des stéréotypes qui tendent à exclure la pauvreté, sans la résorber, du siège social que constitue la rue.
Si les communes précisent souvent que les interdictions ne valent qu’en cas de trouble à l’ordre public, les personnes sans abri sont en réalité déplacées par les forces de l’ordre – bien souvent par la seule police municipale – du seul fait de leur précarité.
Ces arrêtés discriminatoires violent de nombreux droits fondamentaux par leur caractère disproportionné, tels que la liberté d’aller et venir, les valeurs d’égalité et de fraternité ou encore la dignité de la personne humaine.
Nos organisations demandent donc à la Défenseure des droits de constater la discrimination indirecte et l’atteinte qui en résulte aux droits des personnes sans abri que constituent ces arrêtés et, à cet égard, d’interpeller les ministres de la solidarité et de l’intérieur sur cette situation, tout en recommandant aux municipalités d’y mettre un terme.
Paris, le 23 juin 2022
Signataires : LDH (Ligue des droits de l’Homme) ; Fondation Abbé Pierre ; Fédération Entraide Protestante ; Collectif national droits de l’Homme Romeurope ; La Cloche ; Association DALO ; Collectif Les Morts de la Rue ; ATD Quart-Monde ; Unafam ; Cités caritas ; Fnasat ; Solidarités nouvelles pour le logement ; Secours Catholique ; FAPIL ; Les enfants du canal ; Emmaüs solidarité