Note commune dont la LDH est signataire
Suite à la publication de la proposition de directive sur le devoir de vigilance des entreprises par la Commission européenne, la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) et 22 de ses organisations membres attirent l’attention des décideur-e-s politiques européen-ne-s sur des points cruciaux du texte devant être améliorés pour que la directive soit à la hauteur des enjeux. Cette note de position (disponible en anglais) vise à souligner le manque de clarté ou la faiblesse de certains articles de la proposition. Elle contient plusieurs recommandations essentielles pour que ce texte constitue une réelle avancée vers une protection accrue des droits humains et de la planète.
Le 23 février 2022, la Commission européenne a publié sa proposition de directive sur le devoir de vigilance des entreprises. La FIDH et 22 de ses organisations membres basées en Afrique, en Asie, en Europe et en Amérique latine, publient en ce jour l’analyse ci-contre et plusieurs recommandations adressées aux décideur·es politiques négociant actuellement le texte proposé.
L’ineffectivité des instruments actuellement en vigueur pour prévenir les violations des droits humains et de l’environnement perpétrées par les entreprises n’est plus à prouver. À cet égard, la société civile réclame depuis de nombreuses années un cadre réglementaire européen amélioré, qui établirait une obligation pour les entreprises de respecter les droits humains et l’environnement – exigeant clairement des entreprises qu’elles identifient, préviennent, mettent fin et réparent les atteintes et dommages commis dans leur chaîne de valeur. À ce titre, en 2020, la FIDH et plusieurs de ses membres publiaient une note de position défendant une législation ambitieuse, pour laquelle elles avaient déjà formulé diverses recommandations.
La proposition de la Commission représente une nouvelle étape fondamentale dans la lutte pour une meilleure protection des droits humains et de l’environnement. Cependant, malgré les aspects positifs, la directive proposée par la Commission n’est pas à la hauteur des enjeux discutés sur de nombreux points fondamentaux. Celle-ci s’éloigne considérablement des normes internationales, notamment en ce qui concerne son champ d’application et la consultation des parties prenantes affectées par les activités des entreprises.
Avant que la directive ne soit adoptée, le Conseil de l’Union européenne et le Parlement européen discuteront du texte et auront la possibilité d’y introduire d’importantes améliorations. La FIDH leur recommande de prendre en considération les points suivants.
Aligner le champ d’application de la directive avec les normes internationales, retirer les régimes d’exception dont bénéficient certains secteurs et garantir la proportionnalité des mesures de régulation. La directive ne peut être véritablement effective qu’avec l’élargissement de son champ d’application normatif, des entités de la chaîne de valeur couvertes par le devoir de vigilance et des entreprises concernées par ces obligations.
Renforcer le rôle de la société civile et la place des populations affectées dans la procédure de devoir de vigilance, en portant une attention particulière aux peuples autochtones et aux défenseur-e-s des droits humains.
Veiller à ce que le contenu du devoir de vigilance ne puisse pas se résumer à un simple exercice de compliance (mise en conformité), en supprimant par exemple le recours excessif aux clauses contractuelles.
Renforcer les mesures sur la responsabilité civile et garantir un meilleur accès à la justice aux victimes, notamment par un renversement de la charge de la preuve.
Requérir un renforcement des obligations de devoir de vigilance en zone de conflit ou dans les zones à haut risque.
Assurer un désengagement responsable, et préciser les exigences à cet effet.
L’effectivité et le futur de cette directive sont désormais entre les mains des décideur-e-s politiques européen-n-es. L’adoption d’un devoir de vigilance véritablement ambitieux revêt une telle importance qu’il n’est plus le temps des mesures superficielles qui protègent davantage les entreprises que les populations affectées.