Depuis le 19 septembre 2002, la Côte d’Ivoire est le théâtre d’une guerre civile, les mouvements rebelles ayant pris le contrôle de tout le Nord du pays. Les négociations entamées à Lomé semblent être dans une impasse et le cessez-le feu un temps respecté n’est plus qu’un souvenir : la mobilisation générale vient d’être décrétée par le gouvernement ivoirien. Une conflagration générale menace l’ensemble de la région.
Cette guerre civile s’accompagne de violations graves des droits de l’Homme, en particulier de la part des troupes gouvernementales et de leurs soutiens contre les étrangers et les réfugiés. Une véritable chasse à l’Homme à l’encontre des Burkinabé, réputés être responsables de la rébellion, a lieu à Abidjan. Des quartiers entiers d’habitation des étrangers ont été pillés et rasés. Des milliers de réfugiés quittent le pays à destination du Ghana ou le Mali pour échapper à cette terreur. Des escadrons de la mort -dignes du sinistre réseau Zéro rwandais- exécutent nuitamment des personnes réputées être proches de la rébellion ou du RDR (le parti d’Alassane Ouattara, exilé au Gabon). A Monoko Zohi, d’après plusieurs témoignages concordants, un charnier de 120 personnes, des civils pour la plupart d’origine étrangère qui auraient été exécutés par les militaires loyalistes, vient d’être découvert..
Cette situation inquiète légitimement les autorités françaises qui ont décidé une action diplomatique d’envergure et une intervention militaire récemment renforcée. En revanche, les Ivoiriens en quête d’une protection qui arrivent à Roissy et demandent l’asile à la frontière, ne sont pas le même sujet d’inquiétude. Pour eux, et ils sont des dizaines, ce sont des décisions de refus d’entrée au titre de l’asile et de tentatives de renvoi forcé qui sont mis en oeuvre.. Alors que tous expriment des craintes personnelles, le ministère des affaires étrangères qui les auditionne et le ministère de l’intérieur estiment, avec des critères excessivement restrictifs leur demande manifestement infondée. Si cet excès de rigueur touche l’ensemble des demandeurs d’asile placés en zone d’attente, renvoyer qui que soit vers Abidjan au moment même où la plupart des pays européens exigent l’évacuation de leurs ressortissants, est intolérable.
Il en est de même pour des ressortissants ivoiriens en situation irrégulière en France qui sont placés en centre de rétention pour être renvoyé dans ce pays.
C’est pourquoi nous demandons :
-Qu’un moratoire des refoulements et des éloignements soit décrété par le Ministre de l’Intérieur vis à vis des ressortissants ivoiriens et de toutes les personnes menacées dans ce pays et qui arrivent en France pour demander la protection de la convention de Genève.
– Que les ressortissants ivoiriens puissent accéder à la procédure de statut de réfugié auprès de l’OFPRA,
-Que toutes les personnes qui sont encore bloquées en Côte d’Ivoire et qui sont persécutées en raison de leur origine ou de leur opinions, obtiennent des visas au titre de l’asile.
Premiers signataires de la CFDA (Coordination française pour le droit d’asile) : A.C.A.T (Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture), APSR (Association des Personnels de Santé Réfugiés), CASP (Centre d’Action Sociale Protestant), CIMADE (Service Œcuménique d’Entraide), FORUM REFUGIES, GAS (Groupe Accueil et Solidarité), GISTI (Groupe d’information de soutien aux immigrés), L.D.H (Ligue des Droits de l’Homme), MRAP(Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples)
Autres signataires :
Association Survie, C.C.F.D. (Comité Catholique contre la faim et pour le développement)
Paris, le 19 décembre 2002