Pour rappel, depuis le 13 novembre 2015, le gouvernement français a informé la Commission européenne du rétablissement des contrôles aux frontières intérieures en application des articles 23 et suivants du règlement n°562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 dont la dernière version est issue du règlement (UE) n°2016/399 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016.
Le rétablissement des contrôles aux frontières intérieures de la France a constamment été prolongé par la suite et jusqu’à ce jour, le dernier rétablissement en date ayant été notifié à la Commission européenne pour la période allant du 1er mai 2022 au 31 octobre 2022.
Le rétablissement de ces contrôles a mené la France à mettre en place des points de passage autorisés (PPA) pour réaliser les contrôles aux frontières intérieures. Dans le cadre de ce dispositif, les services de la police aux frontières opposent aux personnes étrangères qui ne disposent pas de documents de voyage des refus d’entrée sur le territoire en application des dispositions de l’article 32 du code des frontières Schengen et des articles L. 332-1 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (ci-après Ceseda). La frontière franco-italienne est très concernée. Plus de 50 000 décisions de refus d’entrée y ont été notifiées en 2017, plus de 32 000 en 2018, près de 30 000 en 2019 et près de 27 000 sur les 10 premiers mois de l’année 2020.
La LDH, associée à ses sept autres partenaires associatifs est à nouveau intervenue volontairement à l’appui de la requête en référé-liberté déposée par l’Anafé devant le tribunal administratif de Grenoble pour exiger la fermeture immédiate des locaux privatifs de liberté situés au point de passage autorisé du tunnel de Fréjus et, à titre subsidiaire, la suspension de la décision du 1er septembre 2022 de la police aux frontières de Modane portant refus d’accès aux locaux situés au point de passage autorisé du tunnel de Fréjus.
Dans son ordonnance du 12 septembre 2022, le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a censuré le refus d’accès des associations humanitaires au motif que « l’Anafé est fondée à soutenir que le refus d’accès qui lui a été opposé la place dans une situation d’urgence et que le fait qu’elle ne puisse accéder à ce local où se trouvent des ressortissants étrangers en situation complexe porte une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté des associations d’aider autrui dans un but humanitaire, liberté qui comporte celle de s’assurer que les libertés fondamentales des personnes mises à l’abri soient respectées pendant leur séjour dans le local ».
Le tribunal administratif enjoint ainsi au préfet de la Savoie de « prendre une nouvelle décision autorisant l’accès ponctuel de l’association requérante aux locaux en litige, dans des conditions permettant la conciliation du droit des associations humanitaires avec l’impératif de bon fonctionnement de ce local, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la présente ordonnance ».
Il n’est en revanche pas fait droit à la demande de fermeture des locaux. Conformément à la décision du Conseil d’Etat d’avril 2021, il admet la licité de l’existence de ces locaux pourtant créés hors de tout cadre légal qui permettent d’assurer des « conditions d’attente plus sûres » aux personnes non admises.