Les préfectures chargées d’appliquer la politique liberticide du ministre de l’Intérieur pensaient avoir trouvé la parade : publier quelques heures avant leur entrée en vigueur, voire même après, les arrêtés portant interdiction de manifester, empêchant ainsi toute contestation utile.
Au cours du printemps 2023, les préfets ont interdit des manifestations par des décisions qui ont été publiées ou notifiées très peu de temps avant, voire au cours même de leur tenue.
Une telle circonstance a réduit à néant toute possibilité d’effectuer un recours en temps utile à leur encontre et constituant ainsi une atteinte à l’exercice de la liberté de manifester.
En outre, une telle interdiction administrative exposait également les participantes et participants à des sanctions pénales alors même qu’ils n’ont pu être mis en mesure d’être informés de celle-ci.
Aussi, le 16 mai 2023, la LDH a demandé à la Première ministre de procéder à l’abrogation des articles R.211-26-1 et L.211-4 du code de la sécurité intérieure au motif que l’ensemble de ces textes portent une atteinte disproportionnée au droit au recours juridictionnel effectif et au droit d’expression collective des idées et des opinions, notamment protégés par les articles 16 et 11 de la Déclaration du 26 août 1789 ainsi que par les articles 10 et 11 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme.
Par son silence, la Première ministre a opposé un refus implicite à cette demande. Au mois d’octobre, la LDH a donc introduit un recours en annulation contre cette décision.
En outre, au soutien de son recours pour excès de pouvoir, la LDH a soulevé une question prioritaire de constitutionnalité tendant à faire constater la non-conformité aux droits et libertés constitutionnellement garantis par la Constitution des dispositions de l’alinéa 1er de l’article L.211-4 du code de la sécurité intérieure en ce qu’elles prévoient :
« Si l’autorité investie des pouvoirs de police estime que la manifestation projetée est de nature à troubler l’ordre public, elle l’interdit par un arrêté qu’elle notifie immédiatement aux signataire de la déclaration au domicile élu […] ».
En effet, sans prévoir des garanties légales suffisantes et adéquates permettant la connaissance effective mais aussi la contestation en temps utiles de cette interdiction, le législateur a, d’une part, méconnu le droit à un recours juridictionnel effectif et le droit d’expression collective des idées et des opinions et, d’autre part, a porté une atteinte injustifiée et disproportionnée à ces mêmes droits.