Pétition signée par Marie-Christine Vergiat, vice-présidente de la LDH
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Les services publics constituent le socle de notre modèle social. Ils sont un vecteur d’intégration républicaine et traduisent nos aspirations collectives à l’égalité en droit et en dignité.
Pourtant, le projet de loi « pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration », qui vient d’être adopté par le Sénat, et sera bientôt examiné à l’Assemblée nationale, fait totalement l’impasse sur les métiers en tension, essentiels, dans nos administrations publiques.
Nul besoin de convaincre les Françaises et les Français du manque d’effectifs dans nos services publics. L’Education nationale vient de repousser d’un mois les inscriptions aux concours, un tiers des secrétaires de mairie sera parti à la retraite d’ici huit ans, et d’après le conseil national de l’ordre des médecins, les praticiens diplômés hors UE représentent déjà au moins 11% des médecins installés à l’hôpital public.
Alors que la fonction publique fait face à une crise majeure d’attractivité, elle se prive de compétences en excluant une partie de la population : plus de 4 millions d’emplois de fonctionnaires ne peuvent pas être occupés par des étrangers non européens.
Nous l’affirmons avec force : notre fonction publique doit être plus représentative de la société française.
Initialement réservé aux seuls nationaux, le statut de la fonction publique a été ouvert aux ressortissants de l’Union européenne il y a plus de 30 ans, à l’exception de certains emplois relevant de la souveraineté nationale ou de prérogatives de puissance publique.
Le temps est venu de franchir une nouvelle étape pour des personnes qui vivent régulièrement en France, contribuent à la solidarité nationale en payant leurs impôts et travaillent déjà dans nos services publics, le plus souvent dans des conditions précaires.
En effet, aujourd’hui, nos administrations ne peuvent employer des personnes étrangères extra européennes que sous un statut de contractuel, un grand nombre se voyant renouveler leur contrat d’année en année, sans perspective d’évolution de carrière et de rémunération. Les étrangers extra-européens ne pouvant pas être fonctionnaires titulaires, mais seulement recrutés par voie contractuelle, cette situation se révèle aujourd’hui une hypocrisie juridique, une source d’inégalités sociales et une hérésie face aux difficultés de recrutement de la fonction publique.
Nous les côtoyons chaque jour, au guichet des administrations, au chevet des malades à l’hôpital, dans nos rues au ramassage des déchets, dans les couloirs de nos bâtiments à l’entretien des locaux, dans nos services informatiques…
Nos services publics, qui devraient être socialement exemplaires, alimentent ainsi discriminations et inégalités en toute légalité, pour exercer exactement les mêmes missions que des fonctionnaires titulaires. En toute hypocrisie, notre modèle laisse les associations et sous-traitants recruter ces personnes sur les mêmes missions. Par ailleurs, les difficultés de renouvellement des titres de séjour, qui constituent des éléments obligatoires pour bénéficier d’un contrat de travail, les privent de salaire à l’expiration de leur titre de séjour et les soumettent à des démarches administratives fastidieuses, stressantes et précarisantes. Ces lourdeurs administratives sont également pénalisantes pour les employeurs publics qui peuvent être confrontés à des ruptures de continuité de service si la personne étrangère ne peut plus travailler dans l’attente du renouvellement de son titre de séjour.
C’est pourquoi, dès 2009, la prédécesseure de la Défenseure des droits, la Halde, Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité, recommandait déjà de supprimer la condition de nationalité pour accéder à la fonction publique.
Le laboratoire d’idées Le Sens du service public demande au gouvernement et aux parlementaires de mettre un terme à cette anomalie à l’occasion du projet de loi qui arrive en discussion à l’Assemblée nationale ou du futur projet de loi fonction publique annoncée pour 2024.
Le droit est aujourd’hui en retard sur la réalité et les besoins de nos services publics. Nous avons l’occasion de faire changer les choses.
Nous espérons ainsi que les prochaines semaines permettront que le débat public porte sur les vrais besoins de modernisation de notre pays plutôt que sur la surenchère de peurs et de replis des droits.
Premiers signataires : Parlementaires : Clémentine Autain, députée de Seine-Saint-Denis ; Grégory Blanc, sénateur de Maine-et-Loire ; Arthur Delaporte, député du Calvados ; Yannick Jadot, sénateur de Paris ; Corinne Narassiguin, sénatrice de Seine-Saint-Denis ;Christine Pirès Beaune, députée du Puy-de-Dôme ; Aurélien Taché, député du Val-d’Oise ; Boris Vallaud, député des Landes. Association : Marie-Christine Vergiat, vice-présidente de la LDH (Ligue des droits de l’Homme). Fondateurs du Sens du service public : Emilie Agnoux ; Léonore Belghiti ; Laure de la Bretèche ; Vincent Dubail ; Delphine Cervelle ; Matthieu Girier ; Ludovic Grousset ; Noam Leandri ; Jérôme Lesavre ; Alexis Masse ; Bastien Taloc ; Johan Theuret ; François Thomazeau.