Tribune collective de syndicats enseignants, lycéens, étudiants et d’associations d’élus ou encore de parents, et signée notamment par la LDH
Ecole de toute la jeunesse, l’école publique, laïque, gratuite et obligatoire doit être la priorité du pays. Elle doit assurer l’égal accès de toutes et tous aux mêmes enseignements, dans les meilleures conditions sur l’ensemble du territoire. Cela passe par des politiques qui assurent la mixité sociale et cassent les phénomènes de ghettoïsation et de séparatisme social.
Seule l’école publique laïque scolarise tous les jeunes. Il est plus que temps de cesser de les diviser. L’enseignement privé sous contrat, financé à 73 % par l’argent public, sépare les élèves. Ceux de familles très favorisées en constituaient 26,4 % des effectifs en 2000, ils en représentent 40,2 % en 2021. Les élèves de milieux favorisés ou très favorisés y sont majoritaires (55,4 % en 2021 contre 32,3 % dans le public).
Le public scolarise trois fois plus d’élèves boursiers (29,1 %) que le privé (11,8 %). La concurrence inégale et faussée de l’enseignement privé sous contrat participe à la ghettoïsation, notamment des quartiers populaires. Le financement collectif du séparatisme social et scolaire n’est pas acceptable, l’argent public doit aller à l’école publique. Cela permettra notamment une gratuité complète effective, particulièrement utile à la scolarisation des élèves des familles les plus défavorisées.
Redonner espoir et ambitions à toute la jeunesse, nécessite de concrétiser partout les visées émancipatrices de l’école publique laïque. Elle ne se défie pas de ses élèves. La laïcité scolaire doit leur permettre d’entrer dans une dimension réflexive et critique dans laquelle, dans le cadre de la loi, leurs questionnements ou avis sont légitimes et mis en perspective par les programmes et les enseignements.
Attaques des réactionnaires
Laïque bien avant la République, l’école publique fait le choix des savoirs et de la raison pour participer à la construction de l’esprit critique et d’une pleine liberté de conscience. Elle promeut l’égalité de genre et combat toutes les formes de discrimination et de racisme. Des citoyens et citoyennes, formés dans le cadre républicain du principe de laïcité, peuvent ainsi faire obstacle à toutes les dominations.
Faute de moyens et d’ambition pour son développement, faute d’une défense véritable face aux attaques qu’elle subit de la part des réactionnaires de tous bords, l’école publique laïque est aujourd’hui abîmée, y compris par des réformes et expressions gouvernementales.
L’école publique laïque n’incarne pas un idéal éthéré derrière lequel se réfugier à chaque drame pour mieux poursuivre ensuite les politiques de son affaiblissement. Les attentats islamistes comme les offensives réactionnaires (dans lesquelles fondamentalismes religieux et extrême droite sont très actifs) contre des enseignements, des établissements et des personnels, le relativisme scientifique galopant, la désinformation rappellent les enjeux démocratiques inhérents au renforcement de l’école laïque. Les politiques publiques, y compris de l’institution scolaire, doivent cesser de l’affaiblir.
Pour une école pleinement utile à la jeunesse, il faut investir dans la formation initiale et continue de tous les personnels, dans une revalorisation sans condition de leur rémunération, leur garantir un cadre de travail respectueux de leurs hautes qualifications et de leur personne. Il faut des actes pour assurer la protection, le respect et la valorisation des personnels comme de leurs métiers.
Incarnation quotidienne de la laïcité
L’école publique laïque doit recevoir les moyens humains et matériels lui permettant de faire vivre ses ambitions intellectuelles et civiques. Elle crée les conditions de l’émancipation en protégeant de tout prosélytisme et en faisant cesser en son sein toutes les assignations. Cela doit être préservé et expliqué. Y faire venir, étudier, s’épanouir tous les jeunes doit être une exigence nationale.
Ce n’est pas le projet de celles et ceux qui prétendent défendre la laïcité de l’école, soit pour stigmatiser les musulmans, soit pour y perpétuer leurs tutelles morales, religieuses, sociales, économiques. Face à ces défis, il faut que le principe de laïcité et les conditions de son application permettent l’accueil de tous les élèves sans discrimination et sans concession à l’égard de toutes les formes de pression ou de prosélytisme. L’incarnation quotidienne de la laïcité à l’école ne doit en aucun cas la dénaturer en la faisant passer pour ce qu’elle ne peut pas être, une règle disciplinaire ou une doxa parmi d’autres. L’école laïque doit faire percevoir l’utilité pour toutes et tous du principe de laïcité.
Il est urgent que la République soutienne pleinement son école, la seule école de toute la jeunesse vivant dans ce pays. Ensemble nous nous tenons debout, afin de construire le rapport de force nécessaire pour réaliser partout les ambitions de l’école publique laïque.
Liste des signataires : FSU, CGT Educ’action, SUD Education, UNSA Education, Association des libres-penseurs de France, Céméa, Comité nationale d’action laïque, Coopérative des idées 93, FCPE, Fédération nationale des DDEN, Fédération nationale de la libre-pensée, Jeunesse en Plein Air, LDH (Ligue des droits de l’Homme), Réseau français des villes éducatives, Solidarité laïque, Ligue de l’Enseignement, Mouvement national lycéen, l’Union étudiante, Union nationale des étudiants de France, Union syndicale lycéenne.