Une loi qui interdit les signes et tenues qui manifestent ostensiblement l’appartenance religieuse des élèves dans les établissements publics va être probablement adoptée par le Parlement. Certains de nous avons déjà dit que cette loi ne permettra pas le règlement des questions qui se posent et qui dépassent de beaucoup l’objet de cette loi. D’autres ont approuvé, avec ou sans réserves, cette initiative.
Nous pouvons avoir des démarches différentes, voire même des divergences sur les raisons pour lesquelles nous approuvons ou nous n’approuvons pas cette législation. Nous nous retrouvons en même temps sur quelques principes qui nous paraissent essentiels dans une société démocratique et qui nous semblent aujourd’hui remis en cause par le débat qui se déroule.
Cette controverse traverse nos organisations et la société française dans son ensemble. Les arguments échangés méritent d’être entendus et discutés et non de provoquer l’insulte ou la caricature. L’ampleur des contradictions ne justifie pas les épithètes blessantes et les assimilations abusives d’où qu’elles viennent.
Nous refusons que cette question soit instrumentalisée à des fins électoralistes, tant il est vrai que les enjeux et les conséquences de ce projet touchent au plus profond du pacte républicain. Il est déjà suffisant que le Front National utilise ce débat pour saper un peu plus la République et exciter à la xénophobie sans qu’il soit besoin de lui faciliter la tâche.
Nous voyons poindre avec une grande inquiétude deux dangereuses et détestables exploitations de ce débat. L’une conduit à libérer une parole qui met de plus en plus en cause les personnes de confession musulmane, d’origine maghrébine et plus largement la population immigrée. Nul n’est légitime à dénaturer la laïcité en un moyen d’exclusion à raison de l’origine ou de la religion. A l’inverse, nous voyons se développer l’action de ceux qui utilisent ce débat pour favoriser tous les replis communautaires ou la mise en cause des principes de la République. Rien ne peut justifier de telles démarches.
Enfin, nous tenons à dire à celles et ceux qui, dans leur situation quotidienne et au travers de ces débats ressentent une forme de stigmatisation et un accroissement des discriminations dont ils sont victimes, que nous n’avons jamais cessé d’entendre leur souffrance. Nous n’ignorons pas que la situation d’aujourd’hui est, pour une part importante, la conséquence de l’échec des politiques d’intégration. Nous ne nous satisfaisons pas des annonces, maintes fois répétées en ce domaine et pour la dernière fois par le Président de la République, mais jamais suivies d’effet ou, pire encore, toujours démenties par les faits.
Nous réaffirmons avec force que la laïcité de la République implique, au delà de la séparation des cultes et de l’Etat, au delà même du débat en cours, une politique rigoureuse de lutte contre les discriminations et de lutte contre l’exclusion sociale. Exiger que les principes de la République soient respectés, c’est aussi assurer l’effectivité de l’égalité des droits.
Paris, le 26 janvier 2004
Communiqué commun LDH, CEMEA, CRAP, CSF, Education et Devenir, EEDF, FCPE, FERC/CGT, FGPEP, Francas, FSU, JPA, Ligue de l’Enseignement, MRAP, OCCE, SGEN/CFDT, UNEF et UNL.