Durant le marché international des professionnels de l’immobilier, du 12 au 15 mars 2024, la préfecture des Alpes-Maritimes et le maire de Cannes décident d’interdire toute manifestation sur un grand nombre d’axes routiers et piétonniers à Cannes, et l’une d’elles en particulier visant à la dénonciation de la spéculation immobilière et la crise du logement. La LDH (Ligue des droits de l’Homme) continue son combat pour l’exercice effectif des libertés d’expression et de réunion.
Dans le cadre de la mobilisation nationale et européenne du droit au logement, l’association Droit au logement (Dal) dépose le 28 février 2024 une déclaration de manifestation auprès des services de la préfecture des Alpes-Maritimes.
L’association projetait en effet un rassemblement statique du lundi 11 mars à partir de 14h jusqu’au 13 mars 2024 à 20h, sur le terre-plein de la place du Général de Gaulle, afin de dénoncer la spéculation immobilière et la crise du logement. Ce rassemblement statique devait être ponctué par des débats ainsi que deux déambulations sur l’allée de la Liberté Charles de Gaulle et ses abords piétonniers.
Le 11 mars 2024 à 9h04, le préfet des Alpes-Maritimes publie un arrêté portant interdiction de manifester sur la voie publique dans la commune de Cannes pendant le marché international des professionnels de l’immobilier (MIPIM) du 12 au 15 mars 2024.
La LDH décide alors d’introduire un référé-liberté à l’encontre de cet arrêté qui constitue une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales que sont les libertés d’expression, d’opinion et de réunion.
Le 12 mars 2024, le juge des référés relève d’une part que, si l’arrêté contesté mentionne de « précédents incidents survenus au mois de mai 2023 lors du festival international du film de Cannes ayant occasionné plusieurs troubles à l’ordre public », aucun fait ou évènement précis, concernant tant l’évènement ainsi mentionné que l’évènement en cause dans la présente instance, n’est toutefois invoqué, qui permettrait de considérer que la mesure la plus contraignante pour les libertés d’expression, d’opinion et de manifestation soit la seule envisageable.
D’autre part, le juge retient qu’il ne résulte pas de l’instruction que le risque de voir converger un grand nombre de manifestants, ou à tout le moins des manifestants au profil de nature à rendre prévisibles des troubles à l’ordre public, soit établi.
Enfin, et eu égard aux risques de troubles à l’ordre public susceptibles d’être causés par la tenue d’une manifestation au cours du MIPIM, dont la réalité n’est pas avérée au regard de l’ensemble des éléments du dossier mais qui ne peut cependant être exclue, le juge constate qu’il n’est en tout état de cause pas établi que le préfet des Alpes-Maritimes ne disposerait pas, dans l’objectif de prévenir ces risques, de moyens moins attentatoires aux libertés fondamentales que la mesure litigieuse.
Dès lors, l’arrêté préfectoral est suspendu.
Insatisfait de la décision ainsi rendue, le maire de la commune de Cannes décide alors dans la foulée du jugement de prendre un arrêté visant de manière détournée à interdire la manifestation déclarée.
Le maire a en effet entendu interdire toute liberté de circulation des piétons et des automobilistes, se traduisant par des regroupements sur la voie publique, des sollicitations intempestives des usagers ou des occupations abusives de la voie publique notamment à l’aide de structures mobiles sur la place du Général de Gaulle et ses abords.
Et plus encore, la mairie a disposé un ensemble de poubelles visant à entraver la manifestation prévue.
Aussi, la LDH saisit de nouveau le tribunal administratif de Nice d’un référé liberté.
Le 13 mars 2024, le tribunal administratif de Nice suspend l’arrêté du maire de Cannes en ce qu’il était constitutif d’une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales d’expression et d’opinion.