Communiqué commun Fédération internationale pour les droits humains (FIDH), LDH (Ligue des droits de l’Homme), Syrian Center for Media and Freedom of Expression (SCM)
Le procès de trois hauts responsables syriens, Ali Mamlouk, Jamil Hassan et Abdel Salam Mahmoud pour complicité de crimes contre l’humanité et délits de guerre se tiendra du 21 au 24 mai prochains devant la Cour d’assises de Paris. Absents, les trois accusés seront jugés par défaut pour la torture, la disparition forcée et le meurtre constitutifs de crimes contre l’humanité, ainsi que pour la confiscation des biens, qualifiés de délits de geurre, de Patrick et Mazzen Dabbagh, ressortissants franco-syriens arrêtés puis détenus à l’aéroport de Mezzeh à Damas en novembre 2013, par des agents du renseignement de l’armée de l’air syrienne.
C’est un procès historique qui s’ouvrira le 21 mai prochain devant la Cour d’assises de Paris. Premier procès en France visant les crimes du régime syrien, il jugera les plus hauts responsables du régime jamais poursuivis en justice depuis l’éclatement de la révolution syrienne en mars 2011, qui s’est traduite par une répression brutale orchestrée par le régime de Bachar el Assad. En octobre 2016, Obeida Dabbagh, frère et oncle des victimes, ainsi que la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) et la LDH (Ligue des droits de l’Homme) avaient saisi la justice française, avec le soutien actif du Syrian Center for Media and Freedom of Expression (SCM), suite à la disparition de Patrick et Mazzen Dabbagh.
« Ce procès marquera l’aboutissement d’un long combat mené devant la justice française pour que les responsables de la disparition forcée de mon frère et de mon neveu soient sanctionnés. Notre famille a été délibérément tenue dans l’ignorance du sort qui leur a été réservé pendant tant d’années, c’est aussi un procès pour la vérité » déclare Obeida Dabbagh, frère et oncle des disparus.
Au terme de sept années d’instruction menée par le pôle crimes contre l’humanité du tribunal judiciaire de Paris, Ali Mamlouk, ancien chef du bureau de la sécurité nationale et proche conseiller de Bachar el Assad, Jamil Hassan, ancien directeur des services de renseignement de l’armée de l’air syrienne et Abdel Salam Mahmoud, ancien responsable des investigations dudit service à l’aéroport militaire de Mezzeh à Damas avaient été mis en accusation devant la Cour d’assises de Paris en mars 2023. En l’absence des accusés sur le territoire français, le procès se tiendra selon les règles juridiques du procès par défaut.
« La qualification de crimes contre l’humanité retenue par les juges d’instruction est essentielle car elle suppose de démontrer que les faits commis à l’encontre de Mazzen et Patrick Dabbagh se sont inscrits dans une politique généralisée mise en place par le régime syrien au plus haut niveau pour réprimer l’ensemble de la population syrienne » déclare Clémence Bectarte, avocate de la FIDH, de SCM et de la famille Dabbagh « Ce sont des centaines de milliers de syriennes et syriens qui ont disparu et trouvé la mort, souvent dans des conditions atroces, depuis le début du conflit syrien, aux mains du régime de Bachar el Assad. Leurs familles attendent toujours que justice leur soit rendue ».
Mazzen et Patrick Dabbagh avaient été arrêtés puis emmenés au centre de détention de l’aéroport militaire de Mezzeh à Damas, réputé pour ses conditions de détention inhumaines et la brutalité de ses séances de tortures. La branche d’investigation des services de renseignements de l’armée de l’air syrienne y était dirigée par Abdel Salam Mahmoud.
Après leur arrestation, leur famille n’a eu aucune information quant au sort qui leur avait été réservé. Ce n’est qu’en juillet 2018, à l’occasion de l’émission de certificats de décès par les autorités syriennes, que la famille Dabbagh a été informée que Patrick et Mazzen seraient morts respectivement en janvier 2014 et novembre 2017.
« Il est essentiel de rappeler que les crimes qui seront jugés au cours de ce procès ne sont pas des crimes du passé ; ces crimes sont toujours en cours car le régime syrien jouit d’une impunité totale. Il est indispensable de mettre en lumière l’importance de la lutte contre l’impunité comme moyen de garantir une paix durable, la défaite complète de l’extrémisme et le retour volontaire des réfugiés. » déclare Mazen Darwish, directeur général de SCM et Secrétaire général de la FIDH.
« Alors que certains États normalisent leurs relations diplomatiques avec Bachar el Assad, la France doit continuer de s’opposer fermement à toute tentative de normalisation. Face à l’ampleur et à la gravité des crimes de masse commis en Syrie, elle doit manifester son engagement déterminé en faveur de la lutte contre l’impunité, et nous espérons que ce procès en constituera l’une des étapes » déclare Patrick Baudouin, président de la LDH et avocat de la FIDH et de la LDH.
Le procès public d’Ali Mamlouk, Jamil Hassan et Abdel Salam Mahmoud se déroulera du 21 au 24 mai 2024 devant la Cour d’assises de Paris.
Pour plus d’informations, voir le QUESTIONS-RÉPONSES.
Paris, le 2 mai 2024