Communiqué LDH
La Chine est moderne, la Chine est belle, la Chine avance, la Chine est un partenaire privilégié de la France depuis 1964… Mais quelle Chine ? Celle encensée par Nicolas Sarkozy la semaine dernière, ne peut faire oublier les cris des emprisonnés. Le déplacement du président de la République en Chine, à l’occasion de l’ouverture de l’exposition de Shanghaï, était présenté comme un voyage de réconciliation. L’important, à en croire les deux parties, était de réaffirmer que le Tibet était territoire chinois.
Le Chef de l’État a visité une exposition dont avaient été écartés par emprisonnements, éloignements forcés, assignations à résidence ou menaces renouvelées, tous ceux qui auraient pu troubler l’image d’harmonie proposée par le régime. Depuis des mois, en prévision de cet événement promotionnel de la politique du gouvernement chinois, toutes celles et tous ceux qui luttent pour un état de droit ont été soit condamnés à de lourdes peines de prison, soit privés de tout contact extérieur, soit étroitement surveillés par une police omniprésente, soit enfin dûment prévenus des risques encourus au moindre manquement.
Le président Sarkozy ne s’est permis aucun dérapage même allusif sur l’état de la démocratie en Chine. Oubliés les militants qui dans les entreprises luttent pour des conditions de travail décentes, pour le respect des contrats et des salaires. Réduits au silence, ceux qui protestent contre l’absence de responsabilité des entreprises dans les pollutions terribles qu’elles provoquent en particulier dans les industries extractives. Matraqués, celles et ceux qui s’opposent à un urbanisme sauvage, uniquement fondé sur une maximisation des profits. Emprisonnés, torturés, tués, les membres des peuples intégrés de force, tels les Tibétains, mais aussi les Ouighours, qui ne bénéficient pas, loin s’en faut, de la même reconnaissance médiatique occidentale.
Au premier rang de ces citoyens, nombre d’avocats qui soutiennent, défendent les militants des droits civiques et se battent avec eux au péril de leur vie professionnelle et de leur liberté. Même ceux qui ont reçu naguère un prix des droits de l’Homme de la République française subissent les mêmes brimades que leurs amis du mouvement démocratique. Aucun progrès n’est observable malgré les promesses faites à l’occasion des Jeux olympiques. La démonstration est faite que ces promesses étaient des chiffons de papier et qu’elles n’ont engagé personne du côté chinois.
À un moment où la répression des militants de la Liberté s’alourdit, où nombre d’entre eux sont incarcérés, où les menaces se multiplient à l’encontre des avocats qui osent les défendre contre l’arbitraire du pouvoir, la Ligue des droits de l’Homme rappelle le devoir de combattre partout – et en Chine pas moins qu’ailleurs – pour le respect de la liberté d’expression, pour le pluralisme des idées, pour la liberté d’organisation et pour la libération de tous les prisonniers d’opinion. Pour l’instant, Hu Jin Tao peut sourire de tout cœur en foulant le tapis rouge de la diplomatie aux côtés de Nicolas Sarkozy : la France est venue à résipiscence.
Paris, le 5 mai 2010.