Nous, associations, collectifs, partis, entreprises ou simples citoyens, manifestons notre profonde inquiétude quant au sort de Bernard Rappaz, le pionnier du renouveau du chanvre en Suisse, aujourd’hui en détention dans la section carcérale de l’hôpital de Genève, au 59ème jour de sa grève de la faim.
Alors que la Chambre haute de la Confédération helvétique vient d’adopter un dispositif visant à réglementer la production, la distribution et la consommation de cannabis, la police et la justice du canton du Valais mènent une croisade d’un autre âge contre l’un des principaux artisans de cette réforme. Ce militant écologiste et pacifiste, précurseur dans l’agriculture biologique et dans les énergies douces, fondateur de la société ValChanvre et producteur de dizaines de produits chanvrés parfaitement légaux, se voit reprocher d’avoir stocké, en vue de la prochaine légalisation, des dérivés psycho-actifs de chanvre et surtout d’avoir fourni ces dérivés à des malades sur présentation d’ordonnances établies par des médecins.
Pourquoi vouloir soudain criminaliser un dispositif de distribution de chanvre à usage thérapeutique qui fonctionnait au vu et au su de tous depuis plusieurs années, à la grande satisfaction des usagers et des praticiens ? Est-ce parce qu’il a contribué à améliorer la qualité de vie de patients souffrant de graves pathologies comme la paraplégie, le sida, la sclérose en plaques, que Bernard Rappaz est aujourd’hui traité comme un dangereux criminel ?
Nous prions instamment les plus hautes autorités suisses d’agir avec célérité devant l’imminence d’un désastre.
Cette affaire, survenue dans un pays dont la communauté internationale croyait à tort qu’il avait déjà régulé avec succès ce phénomène social, illustre parfaitement l’hypocrisie mondiale autour du cannabis. La situation dramatique de Bernard Rappaz démontre l’impérieuse nécessité de ne pas se satisfaire de tolérances et de répressions alternées mais surtout d’engager des réformes concrètes. Il est urgent d’instaurer un moratoire international sur les délits cannabiques, instituant ainsi une période provisoire de dépénalisation afin de permettre aux institutions compétentes d’élaborer une réglementation concernant la production, la distribution et la consommation des multiples produits dérivés du chanvre tant dans les domaines agro-industriels que thérapeutique et récréatif.
Paris, le 10 janvier 2002
Premiers signataires
Coordination Internationale du Chanvre, Chanvre et compagnies, Bertrand Lebeau (Président de l’AFR), Ligue des droits de l’Homme, Fabienne Lopez , Jean-Pierre Galland (Président Fédération Circ),…