Communiqué commun LDH et FIDH
Le 8 juillet dernier la Chambre de l’instruction de la Cour d’appel de Nîmes a ordonné la mise en accusation du capitaine mauritanien Ely Ould Dah devant la Cour d’assises du Gard pour les actes de tortures et barbaries commis en Mauritanie sur des citoyens négro mauritaniens dans les années 1990-1992.
La Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et la Ligue française des droits de l’Homme et du Citoyen (LDH) se félicitent de l’arrêt rendu par la Chambre de l’instruction de Nîmes et saluent l’espoir que cette nouvelle étape représente pour les victimes mauritaniennes que la FIDH et la LDH accompagnent depuis 1999.
La décision du 8 juillet 2002 constitue une étape essentielle de la mise en œuvre effective du principe de compétence universelle en ce qu’elle confirme notamment que :
« l’article 689-2 du Code de procédure pénale […] donne compétence à la juridiction française pour poursuivre ou juger, s’il est trouvé en France, quiconque, qui, hors du territoire de la République, s’est rendu coupable de faits qualifiés crime ou délit qui constituent des tortures et autres peines ou traitements cruels ou dégradants, au sens de l’article 1er de la Convention de New York du 10 décembre, en vigueur en France depuis le 26 juin 1987 […]
les faits visés s’incluaient dans le cadre « d’une purge ethnique » et d’une vaste campagne de répression mises en place par le gouvernement mauritanien en poste au pouvoir à l’époque […]
admettre l’applicabilité en France d’une loi d’amnistie émanant d’un État étranger reviendrait pour les autorités nationales à violer les obligations internationales auxquelles elles ont souscrit et à priver de toute portée le principe de la compétence universelle […] et
ordonne enfin la mise en accusation de Ely Ould Dah devant la Cour d’assises du Gard ».
Alors que l’on constate un retour caractérisé et systématique de la torture et des actes de barbarie en Mauritanie, cette décision constitue un espoir immense pour toutes les victimes mauritaniennes mais aussi pour celles et ceux qui, chaque jour, se battent contre l’impunité dans le monde.
Sans surprise, il vient d’être annoncé que Ely Ould Dah a décidé de contester cette décision devant la Cour de cassation. Une ultime étape doit ainsi être franchie pour qu’enfin Ely Ould Dah soit amené à répondre de ses crimes devant une Cour d’assises.
La FIDH et la LDH restent cependant confiantes qu’un tel procès interviendra et réitèrent leur détermination à tout mettre en œuvre dans le cadre de cette procédure, afin qu’il soit rendu justice aux victimes d’Ely Ould Dah
Paris, le 17 juillet 2002
Contact presse
FIDH +33 1 43 55 25 18
LDH +33 1 56 55 51 00
Rappel des faits et de la procédure
Les autorités de la République islamique de Mauritanie ont été dénoncées comme étant responsables de l’utilisation de la torture et de mauvais traitements à grande échelle notamment à l’encontre des négro-mauritaniens. En effet, dès 1986, des officiers de l’armée mauritanienne, tous négro-africains, sont arrêtés, exécutés, empoisonnés ou condamnés aux travaux forcés et torturés.
En novembre 1990, sous prétexte d’un complot qui n’a jamais été démontré, plusieurs milliers de Mauritaniens négro-africains ont été arrêtés et torturés. Il s’agissait de militaires, soldats et sous-officiers en majorité, et de fonctionnaires. Au moins 310 d’entre eux ont été tués dans des conditions atroces : certains sont enterrés vivants, d’autres brûlés, d’autres écartelés entre deux véhicules, d’autres pendus. Fin mars 1991, les rescapés sont libérés, 312 sont radiés de l’armée pour « mauvaise manière de servir » et aucun ne sera jugé. En mai 1993, une loi d’amnistie interdit toute poursuite judiciaire à l’encontre des responsables de ces massacres, cependant clairement identifiés.
Le capitaine Ely Ould Dah était, à l’époque des faits reprochés, officier de renseignements de la base de la prison de Jreïda, chargé de recueillir les aveux de militaires négro-mauritaniens. Des actes de tortures ont été commis à la prison de Jreïda en 1990 et 1991 sur les deux victimes au nom desquelles la plainte a été déposée
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Le 8 juin 1999, la FIDH et la LDH déposaient plainte auprès du Parquet de Montpellier contre le capitaine Ely Ould Dah, officier mauritanien en stage dans une école militaire d’application de Montpellier.
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Mis en examen et écroué le 2 juillet 1999, Ely Ould Dah profita ensuite d’une libération sous contrôle judiciaire pour fuir en avril 2000 vers la Mauritanie où il bénéficie de la protection et de la complicité des autorités mauritaniennes malgré le mandat d’arrêt international lancé contre lui.
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En son absence, le 25 mai 2001, le juge d’instruction de Montpellier rendait néanmoins une ordonnance de mise en accusation d’Ely Ould Dah devant la Cour d’assises.
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Le 20 juin 2001, l’avocat d’Ely Ould Dah a fait appel de l’ordonnance de mise en accusation.
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Le 8 novembre 2001, la Chambre de l’Instruction de Montpellier a déclaré irrecevable l’appel d’Ely Ould Dah comme tardif. L’avocat d’Ely Ould Dah a donc formé un pourvoi en cassation.
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Le 6 mars 2002, La chambre criminelle de la Cour de cassation a cassé la décision de la chambre d’instruction de Montpellier et renvoyé l’affaire devant la Cour d’appel de Nîmes.
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Le 12 juin 2002 audience devant la Chambre de l’instruction de Nîmes.
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Le 8 juillet 2002, la Chambre de l’Instruction de Nîmes confirme la décision déférée dans ses dispositions ordonnant la mise en accusation devant la Cour d’Assises de Ely Ould Dah et sa prise de corps et ordonne la mise en accusation de Ely Ould Dah devant la Cour d’assises du Gard.