Communiqué LDH
La fédération française de football (FFF) est-elle un bastion du racisme institutionnel ? Certainement pas. Est-elle le lieu de pratiques discriminantes ? Il est devenu difficile d’en douter.La LDH dénonce depuis deux ans, sans que, tant du côté des instances de tutelles que des gestionnaires de la FFF, rien ni personne ne bouge, la discrimination que subissent les enfants étrangers dans la délivrance de licence. Ces licences sont refusées sous prétexte de l’application d’une directive au demeurant justifiée de la Fifa contre le trafic de jeunes joueurs et les transferts illégaux. Justifiée, cette directive ne concerne en aucun cas des enfants qui habitent, vivent, étudient et jouent ici.
Comment s’étonner qu’aujourd’hui, cette situation trouve un écho a l’autre bout de la chaîne footballistique sous la forme de proposition de quotas ?
Après un moment médiatique d’émotion, les instances officielles – ministérielle ou fédérales nous assurent qu’il n’y avait finalement pas de quoi fouetter un chat. Pourtant, y compris en constatant les traitements différents annoncés par la fédération après une fausse vraie enquête, l’enchaînement des faits est troublant :
– un dirigeant trouve la situation suffisamment grave pour décider d’enregistrer une conversation dont il dit encore aujourd’hui qu’elle était inacceptable ;
– son contact supérieur, devant la gravité de la chose rapportée, préfère étouffer plutôt que de sévir, car les noms des personnes impliquées pèsent un bon poids ;
– le directeur technique national reconnaît avoir évoqué la question de quotas ethniques, sans que cela le gêne outre mesure et considère qu’avoir écarté la mesure envisagée suffit à le disculper ;
– le sélectionneur national s’excuse d’avoir employé des mots blessants, mais reconnaît les avoir prononcés ;
– tous ces gens assimilent des schémas de jeux à des capacités physiques réelles ou supposées de groupes ethniques spécifiques et disent opérer des sélections selon ces critères, qui deviennent autant de dérives lorsque change la façon de jouer ;
– l’assimilation entre noirs puissants et athlétiques et blancs techniques rusés et intelligents est proférée sans qu’aucun participant ne se formalise de cette banalisation racialiste ;
– parmi les glorieux anciens, même les plus enclins à ne pas se juger les uns les autres, reconnaissent les maladresses, les erreurs, les mots blessants… ;
– enfin, toute honte bue, les responsables au plus haut niveau avouent à demi-mot que les principes doivent s’effacer devant la real politik de la compétition sportive.
Cette politique du déni n’est pas nouvelle. Les faits dénoncés par la LDH n’ont jamais reçu réponse ni de la Halde ni du ministère des Sports. Et les consignes pour la délivrance des licences pour la saison 2011-2012 sont adoptées, en l’état. Faut-il attendre une condamnation au pénal pour que la FFF arrête de considérer comme légitime de créer sa propre loi et d’appliquer son propre droit ?
Il est vrai qu’à quelques semaines de matchs décisifs pour la qualification de la France pour l’euro 2012, il était capital que le football professionnel à 200 000 € par semaine redevienne un modèle présentable. Qu’importe alors, face à cet enjeu de pouvoir et d’argent, les frustrations, les désillusions et la rage de quelques centaines, voire quelques milliers de jeunes enfants amateurs de foot ? Qu’importe qu’on laisse – sans le sanctionner – s’installer un modèle de pensée racialiste dans les plus hautes instances sportives….
La LDH constate qu’au delà de l’antiracisme autoproclamé de la FFF, des pratiques bien réelles de discrimination existent ; elle déplore l’impunité qui l’entoure et considère qu’une telle chaîne de faits convergents aurait méritée qu’une enquête judiciaire se préoccupe de l’existence possible de délits.
Communiqué LDH
Paris, le 13 mai 2011