Communiqué commun LDH FIDH, LIDHO et MIDH
La FIDH et ses ligues membres en Côte d’Ivoire, la Ligue ivoirienne des droits de l’Homme (LIDHO) et le Mouvement ivoirien des droits humaines (MIDH), et en France, la Ligue des droits de l’Homme (LDH), se félicitent de la décision de la Cour d’appel d’Amsterdam, intervenue le 30 janvier, déclarant le président de la société Trafigura, Claude Dauphin, passible de poursuites pénales aux Pays-Bas dans l’affaire du Probo Koala.
« Cette décision de justice ouvre la voie à l’établissement des responsabilités pénales des dirigeants de la société Trafigura, affréteur du navire du Probo Koala, ayant transporté en 2006 -à travers un océan et trois mers- des déchets toxiques, qui, après plusieurs escales, dont celle au port d’Amsterdam, ont été déversés sans traitement dans divers sites du district d’Abidjan, en Côte d’Ivoire », a déclaré Patrick Baudouin, président d’honneur de la FIDH. « Il s’agit d’un message important aux responsables de multinationales impliquées dans des violations des droits de l’Homme, qui ne sont désormais plus à l’abri de poursuites pénales », a-t-il ajouté.
Après une longue procédure, la Cour d’appel d’Amsterdam a finalement estimé que les arguments soulevés par la défense de Claude Dauphin ne justifiaient pas l’impossibilité des poursuites pénales à son encontre aux Pays-Bas. Le président de la société Trafigura, dont des éléments de preuve indiqueraient qu’il avait connaissance et était impliqué dans les décisions prises dès le départ du navire des Etats-Unis jusqu’au déversement des déchets toxiques en Côte d’Ivoire, pourrait être poursuivi pour exportation illégale de déchets toxiques. Il a quinze jours pour faire appel de cette décision.
« Près de cinq ans et demi après le déversement des déchets toxiques en Côte d’Ivoire, les victimes de cette tragédie humaine et environnementale espèrent encore obtenir une véritable justice, préalable indispensable à une juste réparation pour les préjudices qu’elles ont subis et, pour certaines, qu’elles subissent encore aujourd’hui », a déclaré René Legré Hokou, président de la LIDHO
« Même si la procédure néerlandaise ne vise que les faits qui se sont déroulés à Amsterdam, et non le déversement en tant que tel des déchets toxiques à Abidjan, la possibilité de poursuites à l’encontre d’un dirigeant de Trafigura représente une étape importante, que la justice ivoirienne n’a pas été en mesure de franchir », a déclaré Me Yacouba Doumbia, président du MIDH.
Face aux avancées de la procédure néerlandaise, nos organisations s’interrogent sur l’inertie de la justice française dans cette affaire. Pour rappel, Claude Dauphin était également visé, aux côtés de Jean-Pierre Valentini, le directeur Afrique de Trafigura, dans une plainte déposée au nom de vingt victimes ivoiriennes en France par des avocats du Groupe d’action judiciaire (GAJ) de la FIDH le 29 juin 2007. Cette plainte, pour administration de substances nuisibles, homicide involontaire, corruption active de personnes relevant d’Etats étrangers et infraction aux dispositions particulières de mouvements transfrontaliers de déchets, a été classée sans suite par le Parquet de Paris et le recours formulé par les avocats auprès du procureur général en juin 2008 est resté sans réponse depuis lors. « Nous appelons la justice française à revoir cette décision de classement sans suite, dont la motivation était plus que critiquable », a déclaré Pierre Tartakowsky, président de la LDH.
Pour plus de détails sur l’affaire du Probo Koala et les différentes procédures engagées, notamment en Côte d’Ivoire, voir notamment le rapport de la FIDH-LIDHO-MIDH d’avril 2011.
Paris, Abidjan, le 3 février 2012.