En l’espace de deux ans, les actes de racisme ont quadruplé et, parmi eux, les actes d’antisémitisme ont été multipliés par six. Aujourd’hui c’est un bâtiment scolaire qui vient de brûler. L’enquête déterminera les auteurs de cet acte mais, son caractère antisémite doit être, d’ores et déjà, reconnu et dit. Notre condamnation est totale mais nous savons aussi que chaque victime ressent personnellement l’outrage qui lui est fait et qu’elle ne peut se satisfaire d’une réprobation générale et abstraite.
Que des juifs ou leurs lieux de culte soient pris à partie parce que juifs, est tout simplement intolérable. Nous refusons toutes les explications de ces actes qui peuvent conduire à les justifier. En particulier, prendre position sur le conflit israélo-palestinien n’implique nullement de mettre en cause des individus à raison de leurs origines ou de leur foi. La construction de la paix, la légitimité de l’Etat d’Israël et celle d’un Etat Palestinien, toutes deux incontestables, exigent, au contraire, de transcender les appartenances de chacun.
Les mots ne sont pas innocents : les comparaisons historiques déplacées, notamment les références au nazisme d’où qu’elles viennent, les intempérances de langage, la violence des anathèmes ou la manipulation des faits et des idées ne font que renforcer l’intolérance et attiser les peurs. C’est d’abord dans les mots que se manifeste le rejet des autres.
Que l’on ne s’y trompe pas : dénoncer, en particulier, l’antisémitisme ce n’est pas ignorer les autres manifestations de racisme, notamment à l’égard des arabo-musulmans, qui bouleversent la société et interpellent tout autant nos consciences. C’est reconnaître les particularités de ce mal et c’est répondre à l’interpellation de ceux qui en sont les victimes.
Mais, nous ne saurions accepter que notre rejet absolu de l’antisémitisme soit utilisé à des fins politiques ou pour justifier d’autres discriminations. Personne n’est en droit de transformer la critique de la politique du gouvernement d’Israël en une manifestation d’antisémitisme ; personne n’est en droit d’utiliser cette critique pour nier le droit à l’existence de l’Etat d’Israël. On ne saurait, tolérer, non plus, que l’on désigne un groupe pour lui faire supporter une responsabilité collective de ces actes. Nous n’acceptons pas que l’on réponde à l’antisémitisme et au racisme, en favorisant des réflexes communautaires et encore moins en laissant croire que la France serait faite d’un assemblage de communautés dont les intérêts s’opposeraient.
Notre réaction doit être collective parce que le pacte républicain qui nous a été offert par la Révolution française et les valeurs que nous portons commandent que chaque agression antisémite, chaque agression raciste soient une agression contre tous ceux qui vivent en France. C’est de cette manière que nous restaurerons le lien de confiance et de fraternité sans lequel il n’y a pas de ’vivre ensemble’ possible.
Paris, le 17 novembre 2003
Position adoptée par le Comité central du 22 novembre 2003