Communiqué commun REMDH, CFDA, LADDH et SNAPAP
Dans un rapport conjoint publié aujourd’hui, le Réseau Euro-Méditerranéen des Droits de l’Homme (REMDH), le Collectif des Familles des Disparu(e)s en Algérie (CFDA), la Ligue Algérienne pour la défense des droits de l’Homme (LADDH) et le Syndicat National du Personnel Autonome de l’Administration Publique (SNAPAP) interpellent le public algérien ainsi que les observateurs internationaux présents en Algérie, notamment les observateurs de la mission de l’Union européenne, sur les nouvelles lois adoptées en Algérie et sur les violations aux libertés fondamentales et aux droits humains qui s’intensifient en Algérie.
A l’heure où l’échéance électorale du 10 mai 2012 est l’objet de toutes les attentions, ce rapport qui s’intitule « Réformes politiques » ou verrouillage supplémentaire de la société et du champ politique en Algérie ? Une analyse critique », révèle que contrairement aux annonces du Président de la République faisant état de « réformes politiques » et « d’approfondissement du processus démocratique », l’adoption des nouvelles lois est en réalité devenue pour le pouvoir algérien une occasion de maîtriser davantage la société civile et le champ politique, un moyen de renforcer le contrôle de la société algérienne dans son ensemble.
Ce rapport offre un panorama des différents textes de loi à travers des fiches thématiques et des recommandations, portant sur: la loi relative au régime électoral (fiche 1), la loi fixant les modalités augmentant les chances d’accès de la femme à la représentation dans les assemblées élues (fiche 2), la loi relative aux partis politiques (fiche 3), à l’information (fiche 4) et aux associations (fiche 5).
Ces lois, adoptées en janvier 2012 en Algérie dans le cadre des prétendues réformes politiques, marquent une régression notable en matière des libertés fondamentales et ce en violation flagrante des engagements internationaux pris par l’Algérie, notamment des dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques des Nations unies (PIDCP).
Alors que des observateurs internationaux sont déjà présents dans le pays – à l’invitation des autorités algériennes – dans le cadre d’une mission d’observation électorale, la répression policière et les entraves à la liberté d’expression et de manifestation s’intensifient en Algérie. Malgré la levée de l’état d’urgence, l’interdiction de marches pacifiques ou toute forme de manifestation publique à Alger reste en vigueur par une décision du Chef du Gouvernement du 18 juin 2001. Un important dispositif policier est régulièrement déployé à Alger comme dans d’autres villes pour empêcher les citoyens de manifester. Certains d’entre eux sont également arrêtés arbitrairement et retenus pour plusieurs heures dans les commissariats pour la seule raison d’avoir librement exprimé leurs opinions sur la voie publique.
Le 14 avril, à la veille de l’ouverture de la campagne électorale, un rassemblement pacifique à l’initiative des militants du Mouvement des Jeunes Indépendants pour le Changement (MJIC) appelant au boycott des élections a été violemment réprimé par la police. Un des responsables du mouvement, Abdou Bendjoudi, a même été agressé par un agent de police à l’intérieur de la camionnette avant d’être embarqué au commissariat avec 24 militants d’autres organisations, notamment SOS Disparus, parmi lesquels Fatima Yous 78 ans, Djedjigua Cherguit, 72 ans, Hacene Ferhati e Slimane Hamitouche.
De la même manière, les militants des syndicats autonomes font face au mépris, aux menaces et aux représailles de l’administration en raison de leur activité syndicale, et sont sérieusement entravés dans leur exercice du droit de grève et de rassemblement, notamment en période électorale, comme dernièrement la Fédération nationale du secteur de la justice et des enseignants, tout comme le Comité national des travailleurs du pré-emploi et du filet social et le Comité national pour la défense des droits des chômeurs algériens, affiliés au SNAPAP, qui revendiquent leur droit à un travail digne. Le 18 avril, Abdelkader Kharba, membre du Comité national pour la défense des droits de chômeurs et de la LADDH, a été arrêté alors qu’il filmait la manifestation organisée par la fédération nationale du secteur de la justice devant la Cour de Sidi Mohamed à Alger.
Nos organisations appellent les autorités algériennes à libérer immédiatement Abdelkader Kharba, de garantir en toute circonstance son intégrité physique et psychologique, et à mettre un terme aux actes de harcèlement contre les défenseurs de droits de l’Homme y compris par l’abandon immédiat des procédures judiciaires arbitraires à leur encontre.
Nos organisations dénoncent fermement le décalage entre les annonces officielles et les pratiques répressives auxquelles les autorités algériennes ont recours et interpellent le public algérien ainsi que les observateurs internationaux présents en Algérie, notamment les observateurs de la mission de l’Union européenne, sur les nouvelles lois adoptées en Algérie et sur les violations aux libertés fondamentales et aux droits humains qui s’intensifient en Algérie.
Alger, Copenhague, Paris, jeudi 19 avril 2012.
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